Denis part à la retraite

Paroisse Protestante Unie d’Argenteuil, Asnières, Bois-Colombes et Colombes
Dimanche 25 juin 2023 – Culte de sortiePasteurs Denis Heller et Andreas Seyboldt

Lectures bibliques

Exode 20, 8 – 11

8 Souviens-toi du jour du sabbat pour me le réserver.  9Tu as six jours pour travailler et faire tout ton ouvrage.  10Le septième jour, c’est le sabbat qui m’est réservé, à moi, le Seigneur ton Dieu ; tu ne feras aucun travail ce jour-là, ni toi, ni ton fils, ni ta fille, ni tes serviteurs ou servantes, ni ton bétail, ni l’immigré qui réside chez toi.  11Car en six jours j’ai créé les cieux, la terre, la mer et tout ce qu’ils contiennent, puis je me suis reposé le septième jour. C’est pourquoi moi, le Seigneur, j’ai béni le jour du sabbat et je veux qu’il me soit réservé.

Marc 2, 23 – 28

23Un jour de sabbat, Jésus traversait des champs de blé. Chemin faisant, ses disciples se mirent à cueillir des épis.  24Les pharisiens disaient à Jésus : « Regarde, pourquoi tes disciples font-ils ce qui n’est pas permis le jour du sabbat ? »  25Jésus leur répondit : « N’avez-vous jamais lu ce que fit David, un jour où il se trouvait dans le besoin, parce que lui-même et ses compagnons avaient faim ?  26Il entra dans la maison de Dieu au temps du grand-prêtre Abiatar et il mangea les pains offerts à Dieu, que nul n’a le droit de manger sinon les prêtres. Et David en donna aussi à ses compagnons. »  27Jésus leur dit encore : « Le sabbat a été fait pour les êtres humains et non les êtres humains pour le sabbat.  28Voilà pourquoi le Fils de l’homme est maître même du sabbat. »

Marc 6, 30 – 31

30Les apôtres se réunirent auprès de Jésus et lui racontèrent tout ce qu’ils avaient fait et enseigné.  31Il leur dit : « Venez avec moi dans un endroit isolé, pour vous reposer un moment, à l’écart. » En effet, les gens qui allaient et venaient étaient si nombreux que Jésus et ses disciples n’avaient même pas le temps de manger.

Andreas : Bonjour Denis. Alors, j’ai appris que tu allais prendre ta retraite ?

Denis : ET oui l’âge venant…

Andreas : Tu aurais pu me prévenir !

Denis : Tu aurais pu t’en douter ! Tu connais ma date de naissance et j’ai bien plus que 64 ans. …

Andreas : … Alors, comme ça tu bats en retraite. Tu t’avoues vaincu. Tu reconnais ta défaite et tu te retires.

Denis : Détrompe-toi ! Ce sont les militaires qui battent en retraite. Je n’ai pas l’impression d’avoir mené un combat. Et d’ailleurs quelles seraient mes armes ?

Andreas : Oui je te l’accorde. La seule arme que nous avons est celle de la parole ; d’une parole de vie et d’amour… Mais comment vois-tu ta retraite ? Monsieur s’en va !! Et ceux qui restent bossent (tout seuls désormais) !

Denis : Oh ! Tu y vas un peu fort.

Andreas : … Alors, c’est pour toi comme un grand Sabbat. Un Sabbat prolongé ?

Denis : T’as pas tort. … Dans le Décalogue, les Dix Paroles données par Dieu à son peuple, le Sabbat est fixé le 7e jour : le dernier jour de la semaine. Il rappelle les 7 jours de la création.

Andreas : Alors, selon toi, la retraite serait le Sabbat, non pas d’une semaine, mais de toute une vie ?

Denis : Comme d’ailleurs les vacances annuelles seraient le Sabbat d’une année.

Andreas : Pas bête : le 7e jour, le Sabbat de la semaine ; l’été, le Sabbat de l’année ; la retraite, le Sabbat d’une vie.

Denis : Tu vois ? Même la Bible parle de retraite !

Andreas : Mais elle ne dit pas à quel âge il faut la prendre ! … Soyons sérieux : le Sabbat selon la Bible, c’est le repos. La chaise longue 24 h sur 24 ! C’est ce que tu comptes faire ? La belle vie, quoi ?

Denis : Halte-là ! Tu fais erreur. Le Sabbat, ce n’est pas rien faire, ni cesser toute activité. Comme si le Sabbat était l’équivalent de la mort, de l’immobilisme complet. Rappelle-toi ce que dit Jésus !

Andreas : Ah oui ! Tu veux parler de cette parole biblique qui dit « Le Sabbat est fait pour l’homme et non l’homme pour le Sabbat » (Marc 2,27) ?

Denis : Oui, l’humain, l’être humain d’abord… en premier !

Et donc, le refus par Jésus d’un Sabbat qui écraserait l’humain, qui l’empêcherait de vivre ; qui ferait disparaître son humanité. Rappelle-toi : Jésus a guéri, a fait le bien, a nourri, a fait manger ses disciples, même un jour de Sabbat.

Andreas : Donc, un Sabbat qui fait découvrir… qui fait redécouvrir à l’être humain son humanité ?

Denis : Sa vraie humanité ! C’est-à-dire, sa condition de créature de Dieu, dépendant de son créateur et ne pouvant pas se suffire à lui-même.

Andreas : Un Sabbat pour mieux apprécier la vie, les proches, la création.

Denis : Pour prendre le temps de se poser face à soi-même au milieu des autres, au milieu de la création.

Andreas : Je perçois mieux ce que tu veux dire : le Sabbat comme un temps particulier, mis à part, pour considérer autrement la vie, les proches, les autres, son environnement et tous les liens qui nous relient les uns aux autres.

Denis : Oui. Le Sabbat que ce soit le dimanche, les vacances ou la retraite, pour goûter à la vie donnée par Dieu, dont je suis bénéficiaire. Goûter à la présence des autres comme un cadeau qui nous est fait et s’émerveiller devant le mystère de notre terre et de l’univers.

Andreas : Alors, pour toi, ça va être un grand changement, un grand bouleversement. Toi qui ne t’arrêtes pas et dont l’agenda de pasteur est bien chargé !

Denis : Eh bien non, tu vois, car il me semble, justement que toute la vie de l’Église est Sabbat. Elle invite à ce mouvement de retrait, d’écart, par rapport à la vie courante.

Andreas : Veux-tu dire que chaque dimanche on fait retraite ? Veux-tu dire que chaque activité d’Église est comme une petite retraite ?

Denis : Oui ! Tu me comprends bien ! Ne penses-tu pas qu’aujourd’hui, un des problèmes de notre société, est qu’elle fait courir les gens dans tous les sens, et toujours plus vite, le nez dans le guidon, la tête au ras des pâquerettes ?

Andreas : Tu veux parler du rythme effréné qui nous est imposé : performance, excellence, efficacité, rendement, production avec toujours plus de possibilités, de mouvement, d’action, d’information, de consommation.

Denis : Oui, une course folle, sans trop savoir où elle nous mène. Sans hauteur, sans recul, sans prise de distance. On ne sait pas où on va, mais on y va et de plus en plus vite ! On ne choisit pas. On nous fait aller, comme tu sais, les insectes attirés par la lumière, une belle soirée d’été.

Andreas : Et pour aller dans ton sens, même quand il y a une page blanche, un moment creux, vite, on le remplit. On le comble, comme si on avait peur du vide. Les loisirs et les divertissements sont là pour cela.

Denis : L’Église est comme un Sabbat, comme une retraite régulière. Elle dit : Stop ! On s’arrête, pour faire le point, pour prendre de la hauteur et de la profondeur, pour se poser des questions salutaires : Qui suis-je dans ce mouvement de foule ? Qui suis-je ? Où vais-je ? Quelle orientation vais-je prendre ? Quelle action mener ? Que je décide, plutôt que de me laisser entraîner !

Andreas : Ce que tu dis là me fait penser à Jésus qui demande à ses disciples de se retirer avec lui au large pour prier. Jésus lui-même avait besoin de stopper sa course !

Denis : Tu sais, cet « arrêt-stop » que propose l’Église, il est plutôt sympa. Il se vit dans un cadre agréable, dans une ambiance sympathique avec chants, lectures, repas. Il se vit dans un climat d’écoute et de bienveillance mutuelle.

Andreas : À t’entendre, l’Église, c’est un grand Sabbat pour avoir le goût de la vie et se poser ensemble les grandes questions que l’on a tendance à fuir, pour partager ensemble joies et peines.

Denis : J’ose même dire (« Je dirais même plus ») pour se recueillir au sens fort du terme. La vie nous fragmente en mille morceaux, nous découpe en tranches, nous divise, d’un côté en travailleur, de l’autre en consommateur, de l’autre en citoyen, d l’autre en récepteur de message, de l’autre encore en responsable de famille. … Se recueillir devant Dieu pour retrouver son unité, son identité, sa dignité d’enfant de Dieu, pour être unifié par lui dans son Amour.

Andreas : Jusqu’alors, je te suis. Ce qui me gêne, c’est que tu conçois la vie d’Église en retrait, en décalage, sur le côté. Bientôt tu nous diras de la mettre totalement à l’écart comme ces communautés monastiques, hors du monde.

Denis : Je n’ai jamais dit cela ! Se poser, se reposer, se recueillir, se retrouver avec et devant Dieu, ensemble, pour alors mieux rebondir, mieux agir, mieux réagir. Pour être plus clairvoyant, plus engagé, car ressourcé, fortifié.

Andreas : Je suis rassuré ! Jésus, certes, de temps à autre, se retirait, priait son Père, mais aussi et surtout, agissait et se mêlait aux uns et aux autres.

Denis : Sais-tu … mais tu le sais : que ce jour du Sabbat donné au peuple hébreu au désert est devenu pour les chrétiens le jour de la résurrection. Le jour de la fête d’une vie nouvelle, qualifiée d’éternelle ; celle que Jésus a manifesté en passant de la mort à la vie.

Andreas : Oui, en fait, le sens reste le même : le Sabbat est un jour particulier, un temps particulier, pour ne pas se laisser happer par le quotidien et pour goûter à la vie.

Denis : Une vie ! Une vie humaine en tant que créature de Dieu. Une vie humaine aux couleurs de l’Évangile, car portée par le Christ ressuscité. Lui qui fait passer de l’égoïsme à l’amour, du découragement à l’espérance, de la peur à la confiance.

Andreas : Alors, si je te comprends bien, ce que tu dis du Sabbat, que ce soit le Sabbat du dimanche ou le Sabbat des vacances, c’est ce que tu souhaites vivre avec Marie-Pierre à la retraite ?

Denis : Oui. J’aurai du temps, du temps pour me poser, me recueillir, nous poser ensemble et aussi agir, bien-sûr ! Je sais aussi que ce Sabbat qui est vie d’Église ordinaire, je l’ai vécu ici à Bois-Colombes et je dis ma reconnaissance. Temps de halte, de culte, de rassemblement, de réflexion pour être fortifié et pour agir plus fort autour de nous, à travers l’Entraide, le Centre 72 et la Maison des Jeunes et cela pour plus de fraternité et d’humanité. Alors, merci !

Andreas : Et l’été qui vient avec les vacances prises au près ou au loin, peut aussi être un temps de Sabbat, de pause, de ressourcement pour pouvoir, à la rentrée, se mettre en mouvement de plus belle !

Denis : Je serai loin de vous mais avec vous par la pensée et la prière. Encore mille fois MERCI ! Gloire à Dieu ! Amen