Une vérité de vie

Église Protestante Unie d’Argenteuil, Asnières, Bois-Colombes et Colombes
Culte du 12 juin 2022 avec baptêmes de Gaspard et Côme – Pasteur Denis Heller

Texte biblique : Jean 16, 12 à 15

J’ai encore bien des choses à vous dire mais vous ne pouvez les porter maintenant ; 13 lorsque viendra l’Esprit de vérité, il vous fera accéder à la vérité tout entière. Car il ne parlera pas de son propre chef, mais il dira ce qu’il entendra et il vous communiquera tout ce qui doit venir. 14 Il me glorifiera car il recevra de ce qui est à moi, et il vous le communiquera. 15 Tout ce que possède mon Père est à moi ; c’est pourquoi j’ai dit qu’il vous communiquera ce qu’il reçoit de moi.

Prédication

Nous voilà, ce dimanche, face à un texte d’Évangile court et dense, nous pourrions même dire, très court et très dense. Ce matin avec vous, j’essaierai de faire court mais pas aussi dense !

Il est dense parce qu’il fait partie de ce qu’on appelle les discours d’adieux de Jésus. Jésus s’adresse à ses disciples et leur dit qu’il va partir, les quitter. Il leur transmet ses dernières paroles, un dernier message ; d’où la densité, la concentration de ce passage. Une histoire de transmission du maître aux disciples ; comme l’est aussi tout baptême qui est un moment de transmission, d’une génération à l’autre, entre parents et enfants, entre Anaïs et Joris et Gaspard et Côme.

Que transmettre ? Que laisser ? Que donner à celles et ceux qui nous sont chers, qui nous sont proches ?

Jésus promet, après son départ, à ses disciples, la venue du St Esprit, de l’Esprit Saint ; ce que les chrétiens ont fêté dimanche dernier, à la Pentecôte et ce que les enfants du jardin biblique et de l’école biblique étudient aujourd’hui avec leurs responsables.

Une présence de Dieu, autre, nouvelle, comparable, dit-on, à des langues de feu qui se posent sur chacun d’eux et qui a pour effet de les faire parler, de les faire parler des merveilles de Dieu, de les faire communiquer, de les faire témoigner.

Jésus à travers ce court et dense passage de son discours d’adieu, nous en dit un peu plus sur l’Esprit Saint promis, donné aux disciples, le jour de Pentecôte, puisqu’il parle de l’Esprit de vérité. Je cite : » Lorsque viendra l’Esprit de vérité, il vous fera accéder à la vérité tout entière »

Qu’est-ce que la vérité ? C’est Ponce Pilate dans son dialogue avec Jésus avant que celui-ci ne soit crucifié qui demandera :  Qu’est-ce que la vérité ? Une question qui peut être aussi la nôtre.

La vérité avec un grand V peut nous faire frémir et nous faire peur. A regarder l’histoire humaine, tous ceux qui ont prétendu posséder la vérité, détenir la vérité avec un grand V et ont voulu l’imposer aux autres, ont été responsables des plus grands drames humains.

La vérité « justice » a conduit au goulag et au stalinisme. La vérité « pureté » a conduit à la Shoah et au nazisme.

La vérité que pensaient détenir les Églises et qu’elles ont voulu souvent imposer par la force et avec l’appui du pouvoir politique, a conduit aux pires exactions et aux bûchers de l’inquisition.  Et que dire des pouvoirs totalitaires d’aujourd’hui qu’ils soient d’origine religieuse ou idéologique qui contraignent de force leur citoyen et éliminent tout opposant au nom d’une vérité incontestable ?

A ceux qui brandissent une vérité avec un grand V avec fierté et usent de la violence et de la contrainte pour l’installer, faut-il opposer le point de vue inverse ?  Comme quoi tout est relatif, tout se vaut, s’équivaut, qu’il n’y a pas de vérité sinon celles de son désir, de ses envies, de son intérêt, de son point de vue. Ce qui renforce un individualisme à tout crin, dont nos sociétés occidentales souffrent de toute part.

Alors de quelle vérité parle Jésus, lorsqu’ il dit à ses disciples en annonçant Pentecôte : « lorsque viendra l’Esprit de vérité, il vous fera accéder à la vérité tout entière » ? Peut-être faut-il se reporter à ce qui est dit de la vérité, quelques versets précédents aussi dans l’Évangile de Jean, par Jésus lui-même. En effet parlant de lui-même, il dit : » Je suis le chemin, la vérité, la vie »

Une vérité mise en lien avec l’image du chemin et la notion de vie. Une vérité qui n’est en aucun cas un bloc de granit taillé pour l’éternité et qu’il faudrait faire rentrer de force dans les cerveaux. Une vérité en chemin. Une vérité qui nécessite un cheminement, un parcours, le parcours d’une existence Une vérité en chemin car progressant, évoluant, se transformant, s’approfondissant avec le temps. C’est ce qui attend Gaspard er Côme. Votre souhait, vous parents, notre souhait, notre prière, nous Église, c’est qu’ils avancent sur ce chemin de l’existence en découvrant peu à peu cette vérité. Le baptême ne la leur donne pas d’un coup de baguette magique, comme si tout était fait. Non, il les lance, les élance vers un chemin qui s’ouvre à eux.

Une vérité à articuler avec l’image du chemin, une vérité à articuler avec la vie.

Ainsi ce n’est pas une vérité conceptuelle, ni abstraite, ni générale que les disciples sont invités à découvrir. C’est une vérité de vie, une vérité dans la manière de vivre et d’être avec soi-même, avec les autres et avec son environnement. Une vérité qui fait vivre, qui stimule, provoque la vie, rend vivant, pleinement vivant. C’est bien aussi notre prière commune pour Gaspard et Côme. Qu’ils vivent pleinement une vie d’homme ; qu’ils habitent pleinement la condition humaine avec ses capacités d’aimer, de se réjouir, de partager, de réfléchir, de découvrir. Et ils ont besoin à ce stade de leur existence d’être pris par la main, par vous les parents pour qu’ils s’ouvrent à cette vie pleine et humaine.

Cette notion de vérité est mise en lien non seulement avec l’idée de chemin et de vie mais aussi avec la personne de Jésus, lui qui a eu une vie pleinement humaine, habitée et traversée de bout en bout par l’amour, lui qui a révélé un Dieu Père riche en amour, source d’amour. C’est de cette vérité dont parle Jésus, lorsqu’il s’adresse à ses disciples : vérité toujours en chemin conduisant à la vie et traversée par l’amour, une vérité de vie avant tout.

Mais lorsqu’il évoque l’Esprit Saint conduisant à la vérité, il vient rajouter une dimension supplémentaire, tout à fait essentielle à savoir que cette vérité ne peut jamais être imposée. Fondamentalement, elle ne peut pas être transmise, ni donnée de manière automatique. Chacun, chacune se doit de la recevoir, de se l’approprier, de l’intérioriser à sa manière dans sa liberté sous le souffle de l’Esprit Saint, l’Esprit de Dieu. Elle n’est pas un objet qu’on se passe de la main à la main.

Sa découverte dans la foi est fruit du St Esprit, fruit d’une liberté, d’un cheminement intérieur propre à chacun. C’est bien le sens du baptême.

A Gaspard et à Côme par le baptême est proposé un chemin de vie, un chemin de foi pour vivre de cette vérité de vie et d’amour. A eux plus tard de se déterminer, de prendre ce chemin dans leur liberté et sous le souffle du St Esprit.

Nous qui les entourons sommes invités à poursuivre ce chemin, ce cheminement. Une vérité de vie toujours à approfondir, à intérioriser, à incarner, à vivre ! Et ce n’est jamais fini ! Que Dieu nous soit en aide !

Amen.