Remonter la pente (dimanche 1er mai 2016)

Prédication du dimanche 1er mai 2016

Texte biblique : Psaume 139

Pour le pouvoir, ça sent la fin de règne.

Le roi David se sent perdu.

Ses ennemis l’accusent.

Et comme toujours, avec la calomnie, même ses soutiens sont pris de doute.

Et s’il avait trahi le Seigneur ?

Après tout, « il n’y a pas de fumée sans feu ».

Cette situation, nous la connaissons : nous sentir incompris, accusés injustement.

Et, du coup, comme le regard des autres sur nous a changé et que nous dépendons de ce regard, nous ne savons plus qui nous sommes vraiment.

Dans l’un de ses livres, Simone de Beauvoir fait dire à une femme trompée et abandonnée les paroles suivantes : « Je ne sais pas ; non seulement qui je suis mais qui je devrais être. Le noir et le blanc se confondent, le monde est un magma et je n’ai plus de contours. Comment vivre sans croire à rien ni à moi-même ? »

Dans pareille situation, comment se reconstruire ?

Comment retrouver des repères ?

Suivons David dans sa remontée vers la lumière.

Parce qu’il se trouve au fond d’un trou profond, il a besoin d’un point d’appui solide pour remonter.

Ce point d’appui, c’est l’Eternel.

L’Eternel est le créateur de toute chose : « Les cieux racontent la gloire de Dieu » dit le Psaume 19, « le firmament proclame l’oeuvre de ses jours ».

Trois mille ans plus tard, bien sûr, nous comprenons mieux comment l’univers s’est créé, nous percevons son immensité.

Les sciences nous ont fait découvrir la prodigieuse complexité du cerveau, le nombre incroyable de paramètres nécessaires pour que la vie fût possible sur terre.

Bien loin d’éloigner de Dieu, la science renforce l’admiration de David : Dieu, créateur d’un pareil univers, est vraiment un grand Dieu !

Et la première marche vers la paix retrouvée, pour David pour nous c’est la louange, la jubilation : « Je te loue car je suis une créature merveilleuse » dit David.

Et cette louange redouble car David sait qu’il n’exprime qu’une infime partie de la vérité.

L’oeuvre de Dieu va au-delà de ce qu’on peut en comprendre.

Dieu n’est pas simplement le créateur cosmique.

Il connaît sa créature : « Tu m’as scruté et tu sais tout de moi » s’exclame David.

David ne sait plus où il en est.

Il ne sait plus qui il est. Mais Dieu, lui, sait ses intentions profondes.

Comment son Créateur pourrait-il ne pas le connaître mieux que les autres le connaissent, mieux que lui-même se connaît ?

Parce qu’il est accusé à tort, parce qu’il ne sait plus qui il est, David en appelle à Dieu : lui qui sonde au plus profond du coeur, sait s’il est coupable ou innocent.

Dieu sait ce que fait son enfant.

Dieu sait qui est son enfant.

Dieu sait qui nous sommes.

Et Dieu nous aime avec ce que nous sommes.

Si Lilas acquiert cette tranquille assurance, elle grandira en confiance et donc en ouverture.

Troisième marche : Dieu suit chacune de ses créatures.

« Tu poses la main sur moi » dit David.

Comment un père ou une mère pourrait-il se désintéresser de son enfant ?

Comment un bâtisseur oublierait-il la maison qu’il a construite ?

L’Eternel accompagne sa créature.

Et alors que Job s’exaspérait de cette omniprésence divine, le psalmiste rend grâce pour cela.

Même dans le royaume de la mort, Dieu est là.

Aujourd’hui encore, Dieu nous accompagne : sur notre lieu de travail, en famille, lorsque nous nous sentons isolés, même lorsque nous croyons le fuir, mettre de la distance entre lui et nous, il est encore là.

Nous ne sommes jamais seuls.

Notre vie est accompagnée.

Nous traversons parfois des crises personnelles.

Nous nous demandons alors si nous avons une quelconque valeur.

Notre force consiste à nous appuyer sur Dieu, qui nous connaît, qui nous aime et qui ne nous abandonne pas. Et plus nous comptons sur Lui, plus nous savons qui nous sommes et moins nous dépendons du regard des autres.

Comme l’écrit Calvin : « la connaissance de soi et la connaissance de Dieu sont si intimement lié qu’on ne saurait dire lequel conduit à l’autre« .

Quatrième étape vers la lumière : la colère.

« Dieu, si tu voulais massacrer l’infidèle ! » demande David.

Ces quelques versets nous gênent terriblement, ils font « tâche » dans un si beau psaume.

Alors, souvent, nous oublions ce passage…. et vous avez d’ailleurs choisi de ne pas le lire

La colère et la haine sont aujourd’hui des sentiments refoulés : on préfère ne pas en parler, et moins nous en parlons et plus il est présent, inconsciemment.

Pourtant, si les textes bibliques interdisent la vengeance, beaucoup laissent libre cours à la colère des victimes, de ceux qu’on a injustement accusés ou maltraités.

La colère est parfois le passage obligé pour se reconstruire.

Comme l’écrit St Augustin : « L’espérance a deux enfants très beaux : la colère et le courage. La colère face aux choses telles qu’elles sont, et le courage pour les changer.« 

Dire à Dieu sa colère, voire sa haine, dire à Dieu ses désirs de vengeance, lui permet ensuite d’agir en nous et de nous pacifier.

Et nous accédons à la dernière étape : Dieu agit en David.

« Guide-moi, conduis-moi sur le chemin » demande-t-il.

Dieu veut le bien de son enfant, il veut qu’il grandisse.

Et pour cela, il lui indique le bon chemin pour lui.

Nous ressemblons à un artiste qui a le nez collé sur son tableau et ne sait plus comment l’achever.

Il en est de même dans notre vie : nous avons besoin de prendre du champ, en laissant Dieu nous guider, nous dire ce qui est bon, ce qui va dans le sens de la vie.

Par la Bible qu’elle découvrira, par la prière qu’elle expérimentera, Lilas pourra prendre du recul sur ce qu’elle vit et discerner ce qu est lui est bon et utile.

A la différence de David, c’est là, sur cette marche, que nous trébuchons bien souvent.

Nous ne permettons pas à Dieu nous guider car nous ne vivons pas le temps de l’écoute, de la prière, de la disponibilité à Dieu.

Rappelez-vous, avant tout choix, Jésus allait dans le désert ou sur une barque pour entrer en communion avec son Père.

Nous aussi, nous avons besoin de temps et de lieux particuliers pour la prière, mis de côté.

Si nous voulons grandir, il est essentiel de réserver un temps spécifique.

Comme l’écrit Bonhoëffer : « la prière n’est pas l’épanchement accidentel du coeur humain plonge dans la détresse ou dans la joie, mais le fait de s’approprier, d’imprimer dans sa mémoire, d’une façon durable, la volonté de Dieu en Jésus-Christ »

Ce temps, nous devons l’organiser car nous savons bien que, pour chaque moment de la journée, nous avons des occupations plus importantes que la prière.

Un jour, un homme va voir un sage et lui dit : « Vous avez de la chance de passer votre temps à prier. Moi, avec toutes mes occupations, je ne peux prier que lorsque je viens vous voir ».

Le sage lui répondit : « Tu es comme un homme qui s’avance dans la forêt avec un bandeau sur les yeux et qui est tellement occupe a chercher son chemin dans le noir qu’il ne prend pas le temps de l’enlever Tu es comme un bûcheron qui s’épuise a couper un arbre avec une hache émoussée et qui ne prends pas le temps de s’arrêter pour l’aiguiser. Tu es comme un marcheur qui se blesse au pied et qui boîte parce qu’il ne prend pas le temps de retirer le caillou qu ‘il a dans la chaussure« .

Nous avons probablement besoin de nous redonner un rythme : un rythme dans nos rendez-vous avec Dieu, dans notre fréquentation au culte, dans la lecture de la Bible.

Un rythme, non pour accomplir de bons rites religieux, mais pour retrouver des forces et de l’aisance dans notre vie.

David est peu à peu remonté à la surface.

Il a pris appui sur Dieu.

Parce qu’il sait que Dieu l’a créé, que Dieu le connaît, l’accompagne, entend sa colère, le guide, sa vie peut repartir.

Il sait qu’il ne correspond pas à l’image que ses accusateurs ont de lui.

Surtout, il sait que ce n’est pas aux autres de le définir, que ce n’est même pas à lui de le faire, mais que Dieu seul sait qui il est, ce qu’il vaut et ce qu’il peut devenir.

En fondant notre vie sur notre Créateur, puisse Lilas accéder pareillement à la lumière.

Béni soit notre Père !

Amen !