prédication 10 juin 2012

Prédication du 10 juin 2012

Texte biblique : Jérémie 31,31-33

Jésus est le Christ, il est bien le Messie, celui que les juifs attendaient, celui que les prophètes annonçaient.

Jésus est le Christ parce qu’en lui, par lui, Dieu conclut une nouvelle alliance avec son peuple, une nouvelle alliance ouverte tous ceux qui se tournent vers lui.

Telle est la signification profonde de « Christ », « Messie » en hébreu : celui qui inaugure une nouvelle alliance.

Et ce n’est pas par hasard si les 27 livres centrés sur Jésus, des quatre Evangiles à l’Apocalypse forment le « Nouveau testament », traduction ambiguë de deux mots grecs qui signifient « nouvelle alliance ».

Aujourd’hui, nous sommes toujours au bénéfice de cette nouvelle alliance.

Mais, concrètement, qu’est-ce que cela signifie pour nous ?

Pour le comprendre, il faut remonter plusieurs siècles avant Jésus, autour de 587, au temps du prophète Jérémie.

La situation du Royaume de Juda est désastreuse : diplomatiquement, le Royaume a fait le mauvais choix en s’alliant à l’Egypte, puissance déclinante ; militairement, Babylone se prépare à déferler sur la région.

Pour Jérémie, cette situation diplomatique et militaire est le reflet de la mauvaise santé spirituelle du peuple : le peuple juif a oublié sa foi, son Dieu. Il n’y a plus d’hommes justes, il ne reste que des croyants non pratiquants et des pratiquants non croyants.

La première alliance est morte : celle que Dieu avait conclue avec Abraham ; alliance scellée avec Moïse au mont Sinaï, alliance célébrée par le peuple juif, tous les ans, lors de la fête de la Pentecôte.

Cette alliance est morte parce que le peuple l’a négligée.

L’alliance est semblable à l’amour conjugal : elle dépérit si on n’en prend pas soin.

Devant cette situation dégradée, les contemporains de Jérémie sont tentés par deux voies :

Première voie : abandonner Dieu au profit de divinités apparemment plus puissantes ; suivre par exemple Nabu, le dieu babylonien … ou se réfugier chez des astrologues ou des voyants.

Jérémie ferme cette issue ; car, abandonner Dieu, c’est tomber dans le désespoir et suivre des idoles ou des astrologues, c’est tomber en esclavage.

Autre impasse : « replâtrer » l’alliance, en suivant plus fidèlement la Torah, en faisant des efforts pour améliorer sa conduite.

Pour Jérémie, ce replâtrage est une illusion.

Depuis des siècles, des prêtres, des prophètes et des rois ont fait des efforts pour restaurer l’alliance, enseigner la Loi de Dieu.

La dernière grande réforme date d’il y a quelques décennies, lorsque le roi Josias a découvert dans les sous-sols du Temple un texte de lois, qu’on appellera le Deutéronome et qu’il a lancé une grande réforme religieuse.

Comme les autres, cette réforme a échoué.

Jérémie en tire le constat suivant : par ses propres forces, par sa seule volonté, même sincère, par le seul secours des rites et des lois, son peuple ne peut se réformer, ne peut se convertir.

Je vous le cite : « Un Ethiopien peut-il changer de peau ? Une panthère peut-elle changer de pelage ? Et vous, habitués du mal, pouvez-vous bien agir ? »

Un point de non-retour est atteint.

L’ancienne alliance, fondée sur des rites et des lois, ne fonctionne plus.

Une rupture est nécessaire.

Ce constat est toujours valide aujourd’hui.

Bien sûr, en tant que citoyens français et en tant que protestants, notre situation a changé.

De plus, nous ne suivons plus les rites et les lois juives.

Nous ne sommes plus dans la première alliance.

Mais, comme le Royaume de Juda, nous avons conclu des alliances caduques.

En voici trois exemples

  • Pendant des siècles, nous avons cru que le progrès économique, technologique, social ou culturel allait améliorer l’homme, le guérir de sa violence et de son irresponsabilité et beaucoup de protestants ont partagé ce doux espoir. Nous ne le croyons plus aujourd’hui. La planète est à bout de souffle, la crise bancaire s’étend.

  • Pendant des siècles, nous avons cru qu’en menant une vie imprégnée de morale, nous pourrions vivre et témoigner de notre foi. Nous le croyons plus aujourd’hui. La morale met de l’huile dans les rouages mais elle ne rapproche pas de Dieu.

  • Les catholiques croient volontiers que les sacrements les mettent en règle avec Dieu.

    Nous, nous pensons volontiers que la connaissance de la Bible suffit à nous rapprocher de Dieu. Or, si la connaissance de la Bible est indispensable pour construire notre foi, elle ne suffit pas. Combien de protestants sont devenus des spécialistes de la Bible sans que cela ne transforme leur foi, leur vie !

Alors, pour nous aussi, une nouvelle alliance est nécessaire : « Des jours viennent – oracle du Seigneur – où je conclurai une nouvelle alliance avec la communauté d’Israël et celle de Juda., une nouvelle alliance. Elle sera différente de celle que j’ai conclue avec leurs pères lorsque je les ai pris par la main pour les faire sortir du pays d’Egypte. Ils ont rompu cette alliance mais moi, je reste le maître chez eux. Et voici cette alliance que je conclurai avec la communauté d’Israël après ces jours-là : je déposerai mes directives au fond d’eux-mêmes, les inscrivant dans leur être ; je deviendrai Dieu pour eux et eux ils deviendront un Dieu pour moi. Ils ne s’instruiront plus entre compagnons, entre frères, en disant : « Apprenez à connaître le Seigneur ! » car tous me connaîtront, les petits comme les plus grands. Je pardonne leur crime, leur faute, je n’en parle plus ».

Pour les juifs, cette nouvelle alliance est encore attendue.

Pour nous, chrétiens, cette alliance nouvelle a été inaugurée par Jésus, le Christ.

Elle a été scellée le jour de la Pentecôte, lorsque l’Esprit saint a touché le cœur des croyants rassemblés dans une maison de Jérusalem pour fêter la Pentecôte juive et qu’ils ont pu, remplis de foi, constituer l’Eglise du Christ.

Aujourd’hui encore, nous sommes au bénéfice de cette alliance nouvelle.

Qu’est-ce que cette alliance a de si nouveau ?

En quoi peut-elle réussir là où l’ancienne a échoué ?

D’abord, désormais, Dieu prend l’initiative.

Il a pris acte : nous sommes incapables de nous élever spirituellement à l’aide de lois religieuses, de rites, de dogmes et de sacrements.

Alors, il s’y prend autrement.

Il n’attend pas que nous venions à lui, il n’attend pas que nous en soyons dignes.

Il vient vers nous, il vient à nous, en premier, unilatéralement, par grâce.

Quels que soient notre passé, notre parcours de vie plus ou moins chaotique, quels que soient nos doutes, nos blessures, nos désirs.

En échange, Il nous demande simplement d’avoir foi en lui.

Ancienne ou nouvelle, l’alliance se vit toujours à deux, elle dépend toujours des deux partenaires.

Deuxième nouveauté : Dieu agit directement en nous

« Je déposerai ma volonté au fond d’eux-mêmes, les inscrivant dans leur être ».

Soyons lucides : la volonté peut nous rendre plus travailleurs, plus performants, elle peut nous éviter de commettre des actes mauvais mais elle ne peut nous donner ni la paix intérieure, ni la joie, encore moins la foi.

Ces trois biens infiniment précieux, la paix intérieure, la joie, la foi, nous sont donnés par Dieu et par Dieu seul.

Lorsqu’il agit en nous, lorsqu’il « travaille » en nous.

Troisième nouveauté : le pardon

« Je pardonne leur crime. Leur faute, je n’en parle plus ».

Le pardon de Dieu ne s’échange pas contre notre souffrance ou nos remords.

Le pardon nous est donné.

Celui qui en doute peut tourner son regard vers la croix.

Il conviendra alors que puisque le crime le plus terrible – la mise à mort du Christ – a été pardonné, nos fautes le sont à plus forte raison.

Dans l’alliance nouvelle, il n’y a plus de fautes que l’on traîne éternellement.

Il est donc inutile de rafistoler nos vieilles alliances !

Nous sommes au bénéfice d’une nouvelle alliance, inaugurée par le Christ et scellée par le don du Saint-Esprit, le jour de la Pentecôte.

Par elle, Dieu prend l’initiative et vient à nous.

Par elle, il agit en nous.

Par elle, il nous pardonne.

Alors, pour notre joie, vivons pleinement dans cette nouvelle alliance

Amen !