Le figuier stérile

le 24 mars 2019   Culte précédent l’Assemblée Générale de l’Entraide.

Luc 13 v 6 à 9

« Jésus dit aussi cette parabole : Un homme avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint y chercher du fruit et n’en trouva pas.

Alors il dit au vigneron : Voilà trois ans que je viens chercher du fruit à ce figuier, et je n’en trouve pas. Coupe-le : pourquoi occupe-t-il la terre inutilement ?

Le vigneron lui répondit : Maître, laisse-le encore cette année ; d’ici-là je creuserai tout autour et j’y mettrai du fumier. Peut-être à l’avenir produira-t-il du fruit ; sinon, tu le couperas ».

Mais moi, je vous dis de ne pas résister au méchant. Si quelqu’un te frappe sur la joue droite, tends-lui aussi l’autre. Si quelqu’un veut te traîner en justice, et prendre ta tunique, laisse-lui encore ton manteau. Si quelqu’un te force à faire un mille, fais-en deux avec lui. Donne à celui qui te demande, et ne te détourne pas de celui qui veut emprunter de toi. Vous avez entendu qu’il a été dit : Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Mais moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, [bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent], et priez pour ceux [qui vous maltraitent et] qui vous persécutent.

Parabole de ce jour, parabole du figuier stérile qui ne donne pas les fruits attendus, les figues attendus et qui risque du coup d’être coupé, car un figuier planté dans une vigne est fait pour donner des figues ; sinon on l’abat !

 Mais dans notre parabole, il en réchappe car le vigneron lui donne une année de plus. Il pense qu’en bêchant et qu’en mettant du fumier tout autour, il produira du fruit. Le vigneron garde malgré tout bon espoir.

Nos marronniers qui se trouvaient devant le Centre 72 ont été coupés cette semaine. Ils ne donnaient pas les fruits espérés, à savoir le feuillage attendu et l’ombrage souhaité. Ils étaient malades comme la plupart des marronniers en région parisienne, séchant dès début juillet aux premières chaleurs. Et pourtant, on avait espéré qu’ils reprennent de la vigueur en les élaguant, en les taillant. Rien n’y a fait. Il a fallu se résoudre à les abattre après plus de 47 ans de présence devant le Centre 72 ; l’âge de notre Centre ! mais après au moins 80 ans d’une longue vie. Il a fallu l’expliquer et argumenter auprès des voisins, des passants, qui étaient choqués de voir disparaître ces trois arbres.

Un figuier est fait ou plus précisément a pour mission de donner des figues ; comme un marronnier est fait ou plus précisément a pour mission de donner de l’ombrage comme une Église a pour mission de porter des fruits, fruits de foi, d’amour, d’espérance comme une Entraide d’Église au nom de l’Évangile a pour mission de porter des fruits d’accueil, de solidarité, de dignité.

 Une A. G de paroisse comme une AG d’Église sont l’occasion d’examiner, d’évaluer les fruits produits.

De sérieuses questions seraient à se poser si aucun fruit n’était produit, si aucun fruit n’était repéré. Une paroisse comme une Entraide paroissiale ne sont jamais là en autoconsommation, pour se regarder le nombril et se taper sur le ventre, pour vivre en circuit fermé dans une tour d’ivoire.

Dans une démarche croyante, il y a ce premier constat qui est d’avoir reçu, d’avoir beaucoup reçu : la vie, des forces, les autres, des capacités, des compétences ; un premier constat suivi d’un appel impératif, incontournable, insistant qui est celui de donner, de partager, de donner des fruits.

 Une Entraide sans fruits est une Entraide morte qui n’a plus qu’à mettre la clé sous la porte, qu’à prononcer sa dissolution ; en un mot une Entraide à abattre, comme nous l’avons fait pour les marronniers, comme cela aurait pu se produire pour le figuier stérile, depuis plus de 3 ans.

Mais heureusement et nous ne pouvons qu’être reconnaissants, nous ne sommes pas dans cette situation. Les fruits sont nombreux et lors de l’assemblée générale qui va suivre, nous allons en dresser la liste. Ils sont de tailles, de couleurs, de volumes, de natures différents. Ils apparaissent à des saisons différentes de l’année, dans des lieux différents et cela grâce à l’engagement continu de beaucoup d’entre vous.

A la lumière de cette parabole du figuier stérile, la question nous est posée : Y-a-t-il du fruit ? Nous pouvons répondre en chœur d’une seule voix : oui ! Amen ! Alleluia ! Mais à la lumière de cette même parabole, une autre question peut être posée : Y-a-t-il du bon fruit ? Y-a-t-il de bonnes figues ?

Car ce que le propriétaire attend d’un figuier, c’est non seulement qu’il produise des figues mais surtout et encore de bonnes figues. Un figuier produisant des figues pourries ou immangeables remplirait-il la mission attendue par son propriétaire ? Ne risquerait-il pas lui aussi un jour si cela se prolonge d’être coupé ?

Qu’est-ce qu’un bon fruit ? Ce n’est pas tant lié à sa taille, ni à sa couleur, ni à son nombre, ni à sa quantité, ni à son volume, ni son aspect, ni à sa provenance, ni à ses origines, mais plutôt à son goût, à sa saveur, le plaisir du palet !

Mais me direz-vous alors : qu’est-ce qu’un bon fruit produit pour l’Entraide ? Quels en sont les critères les caractéristiques ?

 J’ose reprendre les mêmes qualificatifs : un bon fruit de l’Entraide, ce n’est pas tant lié à sa taille, ni à sa couleur, ni à son nombre, ni à sa quantité, ni à son volume, ni son aspect, ni à sa provenance, ni à ses origines.

Un bon fruit a du goût, le goût de la vie pour celui qui le donne comme pour celui qui le reçoit. Ce bon fruit passe par le goût des autres qui donne de la saveur à toute rencontre, à toute situation. Au regard de l’Évangile, un bon fruit se mesure à cette densité d’humanité qui traverse une rencontre, un dialogue, une relation et qui se traduit dans un regard, dans une parole, un sourire, un éclair de lumière et de confiance dans les yeux.

Ce fruit d’humanité que nous sommes appelés à donner individuellement et collectivement, il se cultive, il se prépare, il s’apprend, il se construit au fur et à mesure de nos réflexions, de nos actions, de nos cheminements spirituels, tout au long d’une vie.

Le miracle de notre parabole de ce matin, c’est que ce fruit qui parfois tarde, a du mal à pousser et à grandir, il nous est donné de le faire apparaître ; car chaque année, chaque moment, chaque étape, chaque AG qui pourraient se transformer en bilan négatif de sanction et de condamnation avec le risque d’élimination et d’abattage, sont suivis d’une marque d’espérance.

Encore et toujours une année de plus pour soigner le figuier, pour le faire croître, le faire donner du fruit.

A chaque instant, une infinie espérance pour que ce fruit d’humanité mûrisse en nous et donne.

Amen

Pasteur Denis Heller

Goût à la vie : la nôtre et celle des autres.

Amen