Judith, aux côtés des pèlerins d’Emmaüs

Culte du 7 avril 2013

 

Texte biblique : Luc 24, 13-35 (Les disciples d’Emmaüs)

 

Moi, Judith, j’ai vécu une expérience qui a bouleversé ma vie.

Cette expérience, je veux vous la partager.

J’étais une jeune femme de Palestine, comme il y en a tant.

J’ai passé mon enfance, dans un village, près du lac de Tibériade, là où le Jourdain se déverse.

J’étais aimée par mes parents.

Je les aidais dans les vignobles.

J’aimais tailler les vignes, cueillir les raisins, malgré la fatigue et les douleurs dans le dos.

En grandissant, j’ai ouvert les yeux sur le monde autour de moi et j’ai désiré le changer.

Ma terre, celle de Galilée, était occupée par les Romains et je voulais qu’ils s’en aillent.

J’étais juive, profondément attachée à l’Eternel mais révoltée par les divisions incessantes entre les différentes groupes religieux, révoltée aussi par ces règles que je trouvais absurdes et inhumaines.

Enfin, j’étais révoltée en tant que femme.

Depuis que l’Eternel a créé le monde, il n’a jamais été facile d’être une femme mais, à cette époque, c’était pire que tout. Je n’avais qu’à attendre le mari que l’on me choisirait, en espérant qu’il serait bon pour moi.

Je voulais donc que le monde change mais comment m’y prendre ?

En attendant, je gardais mes révoltes en moi.

Un jour, mes parents m’ont envoyée faire des courses, au marché de Bethsaïda.

Là, pour la première fois, j’ai entendu parler d’un certain Jésus de Nazareth.

Cet homme, disait-on, avait reçu l’Esprit de Dieu.

Il annonçait la venue du Royaume.

Il comparait Dieu à un berger, recherchant sa brebis égarée, perdue dans la vie.

Il comparait Dieu à un père, attendant le retour de son enfant.

Il comparait Dieu à un trésor, plus précieux que l’or.

Surtout, il disait qu’aux yeux de Dieu, nous étions semblables à une perle de grand prix.

Jusqu’à mon dernier souffle, je me souviendrai de ces mots : moi, Judith, une perle de grand prix, aux yeux du Créateur de l’univers, du roi des rois !

Je voulais rencontrer ce Jésus.

Alors, timidement, j’ai demandé au marchand comment faire.

Il m’a regardée, s’est approché et, discrètement à cause des oreilles indiscrètes, m’a chuchoté à l’oreille : « si tu veux le rencontrer, repasse au marché, demain. L’un de ses disciples y vient, tous les matins, vers la troisième heure ».

Evidemment, le lendemain matin, j’ai saisi un prétexte pour retourner au marché.

Le commerçant m’a désigné le disciple.

Par lui, j’ai pu rencontrer Jésus.

Et pendant trois ans, je ne l’ai pas quitté.

Je l’ai suivi en Galilée, en Samarie, en Judée.

Très vite, j’ai compris qu’il était davantage qu’un grand homme, davantage qu’un sage, davantage qu’un prophète.

Il ne se contentait pas de parler de Dieu et de son amour.

Il ne se contentait pas de le vivre.

Par lui, Dieu agissait réellement.

Des gens à terre étaient relevés, des gens paralysés pouvaient de nouveau avancer dans la vie, des gens aveuglés redevenaient clairvoyants.

Je n’en doutais pas : tout allait changer.

Par lui, le monde entier allait découvrir la puissance et la bonté de Dieu.

J’ai suivi Jésus à Jérusalem.

J’ai cru que ce serait le lieu de son triomphe.

Ce fut celui de son arrestation, de son procès, de sa mort.

Ce qui m’a le plus révoltée, ce n’est pas l’attitude des Romains, ce n’est même pas la lâcheté des disciples, abandonnant Jésus pour sauver leur peau.

Ce qui m’a le plus révoltée, c’est que Jésus se laisse faire, qu’il n’utilise pas sa puissance pour se libérer et montrer à tous qu’il était le Messie.

Ce qui m’a le plus révoltée, c’est que Jésus nous laisse seuls, me laisse seule.

Pourquoi nous avoir fait tant espérer ?

Musique

Alors, comme il n’y avait rien à espérer et tout à craindre, j’ai quitté Jérusalem.

Pendant des heures, j’ai marché, m’éloignant de cette ville maudite et expulsant, peu à peu ma colère, grâce à la fatigue.

Sur la route, je n’étais pas seule.

Fréquemment, je croisais des hommes et des femmes, quittant comme moi la capitale.

Lorsque je leur parlais de Jésus, beaucoup s’éloignaient de moi, par crainte d’être arrêtés.

D’autres ne cachaient pas leur sympathie pour Jésus.

Mais, ajoutaient-ils, cet homme n’était sûrement pas le Messie. Car jamais le Messie ne se serait laissé mettre à mort et jamais Dieu n’aurait laissé faire.

Comment leur en vouloir de penser cela ?

Finalement, deux hommes se sont approchés de moi.

Je les ai reconnus : ils avaient, comme moi, suivi Jésus.

Ces deux hommes étaient bouleversés.

Le matin même, Marie de Magdala et Pierre leur avaient annoncé une nouvelle incroyable : Jésus était vivant, ressuscité.

Aujourd’hui, je dois bien l’avouer : je ne les ai pas vraiment crus.

N’était-ce pas une nouvelle illusion ?

La preuve que nous n’arrivions pas à admettre notre erreur ?

Et puis, si Jésus était vraiment ressuscité, pourquoi ne se montrait-il pas ?

Sans lui, qui nous croirait ?

Sans lui, comment relever, rendre la vue, pardonner ?

J’ai interrogé mes compagnons de route.

Ils se sont tus.

J’ai bien compris qu’ils partageaient mes interrogations.

C’est alors qu’un homme est venu vers nous.

Je voyais bien qu’il nous écoutait attentivement, depuis déjà plusieurs minutes.

Après avoir échangé quelques banalités, il a commencé à nous parler de la Bible.

Il nous en a expliqué le sens profond.

Derrière l’écorce des textes, des mots, des commandements, il nous disait l’intention profonde de Dieu : une alliance intime, une transformation intérieure, une puissance de vie.

Cela me faisait du bien de sentir cet amour de Dieu, présent dans la Bible mais parfois enfouie en elle, comme ces courants marins que l’on ne voit pas à la surface mais dont on ressent la chaleur.

Il nous a expliqué que Jésus était bien le Sauveur, que sa mort était inévitable et que loin d’être un point final, elle ouvrait une nouvelle ère.

Nous l’avons écouté, nous l’avons interrogé.

Nous n’avons pas tout compris.

Mais je sentais, au fond de moi, une joie profonde, comme si je venais de trouver un trésor.

Nous sommes finalement arrivés au village d’Emmaüs.

Le soir tombait.

Les deux disciples m’ont invitée à manger à l’auberge.

Ils ont également proposé à l’homme de rester.

L’homme a pris place avec nous.

Il a partagé le pain.

Il a prononcé ces anciennes bénédictions de Pâque.

Alors, c’est comme si mes yeux s’étaient ouverts !

J’ai compris le sens de ce repas.

J’ai compris que Dieu nous invitait tous, quels que soient nos accidents de parcours.

J’ai compris que Jésus nous avait aimés jusqu’à se donner à nous, comme on donne du pain.

J’ai compris que cette bonne nouvelle se partageait comme un repas.

J’ai compris que cet homme, qui parlait et mangeait avec nous, était le Christ.

J’ai compris qu’il était présent, lorsque nous partagions le pain et le vin, lorsque nous partagions nos soucis et nos joies, lorsque nous nous soutenions les uns les autres.

Je me suis dit alors que tout était possible, puisque Jésus était là, ressuscité.

A ce moment, il s’est dérobé à nous.

Il nous laissait.

Sans lui mais pas démunis.

Il n’était plus là, physiquement mais nous étions forts de sa présence spirituelle, de son Esprit, de la Bible, de la vie fraternelle entre nous.

Désormais, c’est à nous de répandre cette bonne nouvelle et de la vivre.

 

 

Culte du 7 avril 2013

 

Texte biblique : Luc 24, 13-35 (Les disciples d’Emmaüs)

 

Moi, Judith, j’ai vécu une expérience qui a bouleversé ma vie.

Cette expérience, je veux vous la partager.

J’étais une jeune femme de Palestine, comme il y en a tant.

J’ai passé mon enfance, dans un village, près du lac de Tibériade, là où le Jourdain se déverse.

J’étais aimée par mes parents.

Je les aidais dans les vignobles.

J’aimais tailler les vignes, cueillir les raisins, malgré la fatigue et les douleurs dans le dos.

En grandissant, j’ai ouvert les yeux sur le monde autour de moi et j’ai désiré le changer.

Ma terre, celle de Galilée, était occupée par les Romains et je voulais qu’ils s’en aillent.

J’étais juive, profondément attachée à l’Eternel mais révoltée par les divisions incessantes entre les différentes groupes religieux, révoltée aussi par ces règles que je trouvais absurdes et inhumaines.

Enfin, j’étais révoltée en tant que femme.

Depuis que l’Eternel a créé le monde, il n’a jamais été facile d’être une femme mais, à cette époque, c’était pire que tout. Je n’avais qu’à attendre le mari que l’on me choisirait, en espérant qu’il serait bon pour moi.

Je voulais donc que le monde change mais comment m’y prendre ?

En attendant, je gardais mes révoltes en moi.

Un jour, mes parents m’ont envoyée faire des courses, au marché de Bethsaïda.

Là, pour la première fois, j’ai entendu parler d’un certain Jésus de Nazareth.

Cet homme, disait-on, avait reçu l’Esprit de Dieu.

Il annonçait la venue du Royaume.

Il comparait Dieu à un berger, recherchant sa brebis égarée, perdue dans la vie.

Il comparait Dieu à un père, attendant le retour de son enfant.

Il comparait Dieu à un trésor, plus précieux que l’or.

Surtout, il disait qu’aux yeux de Dieu, nous étions semblables à une perle de grand prix.

Jusqu’à mon dernier souffle, je me souviendrai de ces mots : moi, Judith, une perle de grand prix, aux yeux du Créateur de l’univers, du roi des rois !

Je voulais rencontrer ce Jésus.

Alors, timidement, j’ai demandé au marchand comment faire.

Il m’a regardée, s’est approché et, discrètement à cause des oreilles indiscrètes, m’a chuchoté à l’oreille : « si tu veux le rencontrer, repasse au marché, demain. L’un de ses disciples y vient, tous les matins, vers la troisième heure ».

Evidemment, le lendemain matin, j’ai saisi un prétexte pour retourner au marché.

Le commerçant m’a désigné le disciple.

Par lui, j’ai pu rencontrer Jésus.

Et pendant trois ans, je ne l’ai pas quitté.

Je l’ai suivi en Galilée, en Samarie, en Judée.

Très vite, j’ai compris qu’il était davantage qu’un grand homme, davantage qu’un sage, davantage qu’un prophète.

Il ne se contentait pas de parler de Dieu et de son amour.

Il ne se contentait pas de le vivre.

Par lui, Dieu agissait réellement.

Des gens à terre étaient relevés, des gens paralysés pouvaient de nouveau avancer dans la vie, des gens aveuglés redevenaient clairvoyants.

Je n’en doutais pas : tout allait changer.

Par lui, le monde entier allait découvrir la puissance et la bonté de Dieu.

J’ai suivi Jésus à Jérusalem.

J’ai cru que ce serait le lieu de son triomphe.

Ce fut celui de son arrestation, de son procès, de sa mort.

Ce qui m’a le plus révoltée, ce n’est pas l’attitude des Romains, ce n’est même pas la lâcheté des disciples, abandonnant Jésus pour sauver leur peau.

Ce qui m’a le plus révoltée, c’est que Jésus se laisse faire, qu’il n’utilise pas sa puissance pour se libérer et montrer à tous qu’il était le Messie.

Ce qui m’a le plus révoltée, c’est que Jésus nous laisse seuls, me laisse seule.

Pourquoi nous avoir fait tant espérer ?

Musique

Alors, comme il n’y avait rien à espérer et tout à craindre, j’ai quitté Jérusalem.

Pendant des heures, j’ai marché, m’éloignant de cette ville maudite et expulsant, peu à peu ma colère, grâce à la fatigue.

Sur la route, je n’étais pas seule.

Fréquemment, je croisais des hommes et des femmes, quittant comme moi la capitale.

Lorsque je leur parlais de Jésus, beaucoup s’éloignaient de moi, par crainte d’être arrêtés.

D’autres ne cachaient pas leur sympathie pour Jésus.

Mais, ajoutaient-ils, cet homme n’était sûrement pas le Messie. Car jamais le Messie ne se serait laissé mettre à mort et jamais Dieu n’aurait laissé faire.

Comment leur en vouloir de penser cela ?

Finalement, deux hommes se sont approchés de moi.

Je les ai reconnus : ils avaient, comme moi, suivi Jésus.

Ces deux hommes étaient bouleversés.

Le matin même, Marie de Magdala et Pierre leur avaient annoncé une nouvelle incroyable : Jésus était vivant, ressuscité.

Aujourd’hui, je dois bien l’avouer : je ne les ai pas vraiment crus.

N’était-ce pas une nouvelle illusion ?

La preuve que nous n’arrivions pas à admettre notre erreur ?

Et puis, si Jésus était vraiment ressuscité, pourquoi ne se montrait-il pas ?

Sans lui, qui nous croirait ?

Sans lui, comment relever, rendre la vue, pardonner ?

J’ai interrogé mes compagnons de route.

Ils se sont tus.

J’ai bien compris qu’ils partageaient mes interrogations.

C’est alors qu’un homme est venu vers nous.

Je voyais bien qu’il nous écoutait attentivement, depuis déjà plusieurs minutes.

Après avoir échangé quelques banalités, il a commencé à nous parler de la Bible.

Il nous en a expliqué le sens profond.

Derrière l’écorce des textes, des mots, des commandements, il nous disait l’intention profonde de Dieu : une alliance intime, une transformation intérieure, une puissance de vie.

Cela me faisait du bien de sentir cet amour de Dieu, présent dans la Bible mais parfois enfouie en elle, comme ces courants marins que l’on ne voit pas à la surface mais dont on ressent la chaleur.

Il nous a expliqué que Jésus était bien le Sauveur, que sa mort était inévitable et que loin d’être un point final, elle ouvrait une nouvelle ère.

Nous l’avons écouté, nous l’avons interrogé.

Nous n’avons pas tout compris.

Mais je sentais, au fond de moi, une joie profonde, comme si je venais de trouver un trésor.

Nous sommes finalement arrivés au village d’Emmaüs.

Le soir tombait.

Les deux disciples m’ont invitée à manger à l’auberge.

Ils ont également proposé à l’homme de rester.

L’homme a pris place avec nous.

Il a partagé le pain.

Il a prononcé ces anciennes bénédictions de Pâque.

Alors, c’est comme si mes yeux s’étaient ouverts !

J’ai compris le sens de ce repas.

J’ai compris que Dieu nous invitait tous, quels que soient nos accidents de parcours.

J’ai compris que Jésus nous avait aimés jusqu’à se donner à nous, comme on donne du pain.

J’ai compris que cette bonne nouvelle se partageait comme un repas.

J’ai compris que cet homme, qui parlait et mangeait avec nous, était le Christ.

J’ai compris qu’il était présent, lorsque nous partagions le pain et le vin, lorsque nous partagions nos soucis et nos joies, lorsque nous nous soutenions les uns les autres.

Je me suis dit alors que tout était possible, puisque Jésus était là, ressuscité.

A ce moment, il s’est dérobé à nous.

Il nous laissait.

Sans lui mais pas démunis.

Il n’était plus là, physiquement mais nous étions forts de sa présence spirituelle, de son Esprit, de la Bible, de la vie fraternelle entre nous.

Désormais, c’est à nous de répandre cette bonne nouvelle et de la vivre.

 

 

Texte biblique : Luc 24, 13-35 (Les disciples d’Emmaüs)

 

Moi, Judith, j’ai vécu une expérience qui a bouleversé ma vie.

Cette expérience, je veux vous la partager.

J’étais une jeune femme de Palestine, comme il y en a tant.

J’ai passé mon enfance, dans un village, près du lac de Tibériade, là où le Jourdain se déverse.

J’étais aimée par mes parents.

Je les aidais dans les vignobles.

J’aimais tailler les vignes, cueillir les raisins, malgré la fatigue et les douleurs dans le dos.

En grandissant, j’ai ouvert les yeux sur le monde autour de moi et j’ai désiré le changer.

Ma terre, celle de Galilée, était occupée par les Romains et je voulais qu’ils s’en aillent.

J’étais juive, profondément attachée à l’Eternel mais révoltée par les divisions incessantes entre les différentes groupes religieux, révoltée aussi par ces règles que je trouvais absurdes et inhumaines.

Enfin, j’étais révoltée en tant que femme.

Depuis que l’Eternel a créé le monde, il n’a jamais été facile d’être une femme mais, à cette époque, c’était pire que tout. Je n’avais qu’à attendre le mari que l’on me choisirait, en espérant qu’il serait bon pour moi.

Je voulais donc que le monde change mais comment m’y prendre ?

En attendant, je gardais mes révoltes en moi.

Un jour, mes parents m’ont envoyée faire des courses, au marché de Bethsaïda.

Là, pour la première fois, j’ai entendu parler d’un certain Jésus de Nazareth.

Cet homme, disait-on, avait reçu l’Esprit de Dieu.

Il annonçait la venue du Royaume.

Il comparait Dieu à un berger, recherchant sa brebis égarée, perdue dans la vie.

Il comparait Dieu à un père, attendant le retour de son enfant.

Il comparait Dieu à un trésor, plus précieux que l’or.

Surtout, il disait qu’aux yeux de Dieu, nous étions semblables à une perle de grand prix.

Jusqu’à mon dernier souffle, je me souviendrai de ces mots : moi, Judith, une perle de grand prix, aux yeux du Créateur de l’univers, du roi des rois !

Je voulais rencontrer ce Jésus.

Alors, timidement, j’ai demandé au marchand comment faire.

Il m’a regardée, s’est approché et, discrètement à cause des oreilles indiscrètes, m’a chuchoté à l’oreille : « si tu veux le rencontrer, repasse au marché, demain. L’un de ses disciples y vient, tous les matins, vers la troisième heure ».

Evidemment, le lendemain matin, j’ai saisi un prétexte pour retourner au marché.

Le commerçant m’a désigné le disciple.

Par lui, j’ai pu rencontrer Jésus.

Et pendant trois ans, je ne l’ai pas quitté.

Je l’ai suivi en Galilée, en Samarie, en Judée.

Très vite, j’ai compris qu’il était davantage qu’un grand homme, davantage qu’un sage, davantage qu’un prophète.

Il ne se contentait pas de parler de Dieu et de son amour.

Il ne se contentait pas de le vivre.

Par lui, Dieu agissait réellement.

Des gens à terre étaient relevés, des gens paralysés pouvaient de nouveau avancer dans la vie, des gens aveuglés redevenaient clairvoyants.

Je n’en doutais pas : tout allait changer.

Par lui, le monde entier allait découvrir la puissance et la bonté de Dieu.

J’ai suivi Jésus à Jérusalem.

J’ai cru que ce serait le lieu de son triomphe.

Ce fut celui de son arrestation, de son procès, de sa mort.

Ce qui m’a le plus révoltée, ce n’est pas l’attitude des Romains, ce n’est même pas la lâcheté des disciples, abandonnant Jésus pour sauver leur peau.

Ce qui m’a le plus révoltée, c’est que Jésus se laisse faire, qu’il n’utilise pas sa puissance pour se libérer et montrer à tous qu’il était le Messie.

Ce qui m’a le plus révoltée, c’est que Jésus nous laisse seuls, me laisse seule.

Pourquoi nous avoir fait tant espérer ?

Musique

Alors, comme il n’y avait rien à espérer et tout à craindre, j’ai quitté Jérusalem.

Pendant des heures, j’ai marché, m’éloignant de cette ville maudite et expulsant, peu à peu ma colère, grâce à la fatigue.

Sur la route, je n’étais pas seule.

Fréquemment, je croisais des hommes et des femmes, quittant comme moi la capitale.

Lorsque je leur parlais de Jésus, beaucoup s’éloignaient de moi, par crainte d’être arrêtés.

D’autres ne cachaient pas leur sympathie pour Jésus.

Mais, ajoutaient-ils, cet homme n’était sûrement pas le Messie. Car jamais le Messie ne se serait laissé mettre à mort et jamais Dieu n’aurait laissé faire.

Comment leur en vouloir de penser cela ?

Finalement, deux hommes se sont approchés de moi.

Je les ai reconnus : ils avaient, comme moi, suivi Jésus.

Ces deux hommes étaient bouleversés.

Le matin même, Marie de Magdala et Pierre leur avaient annoncé une nouvelle incroyable : Jésus était vivant, ressuscité.

Aujourd’hui, je dois bien l’avouer : je ne les ai pas vraiment crus.

N’était-ce pas une nouvelle illusion ?

La preuve que nous n’arrivions pas à admettre notre erreur ?

Et puis, si Jésus était vraiment ressuscité, pourquoi ne se montrait-il pas ?

Sans lui, qui nous croirait ?

Sans lui, comment relever, rendre la vue, pardonner ?

J’ai interrogé mes compagnons de route.

Ils se sont tus.

J’ai bien compris qu’ils partageaient mes interrogations.

C’est alors qu’un homme est venu vers nous.

Je voyais bien qu’il nous écoutait attentivement, depuis déjà plusieurs minutes.

Après avoir échangé quelques banalités, il a commencé à nous parler de la Bible.

Il nous en a expliqué le sens profond.

Derrière l’écorce des textes, des mots, des commandements, il nous disait l’intention profonde de Dieu : une alliance intime, une transformation intérieure, une puissance de vie.

Cela me faisait du bien de sentir cet amour de Dieu, présent dans la Bible mais parfois enfouie en elle, comme ces courants marins que l’on ne voit pas à la surface mais dont on ressent la chaleur.

Il nous a expliqué que Jésus était bien le Sauveur, que sa mort était inévitable et que loin d’être un point final, elle ouvrait une nouvelle ère.

Nous l’avons écouté, nous l’avons interrogé.

Nous n’avons pas tout compris.

Mais je sentais, au fond de moi, une joie profonde, comme si je venais de trouver un trésor.

Nous sommes finalement arrivés au village d’Emmaüs.

Le soir tombait.

Les deux disciples m’ont invitée à manger à l’auberge.

Ils ont également proposé à l’homme de rester.

L’homme a pris place avec nous.

Il a partagé le pain.

Il a prononcé ces anciennes bénédictions de Pâque.

Alors, c’est comme si mes yeux s’étaient ouverts !

J’ai compris le sens de ce repas.

J’ai compris que Dieu nous invitait tous, quels que soient nos accidents de parcours.

J’ai compris que Jésus nous avait aimés jusqu’à se donner à nous, comme on donne du pain.

J’ai compris que cette bonne nouvelle se partageait comme un repas.

J’ai compris que cet homme, qui parlait et mangeait avec nous, était le Christ.

J’ai compris qu’il était présent, lorsque nous partagions le pain et le vin, lorsque nous partagions nos soucis et nos joies, lorsque nous nous soutenions les uns les autres.

Je me suis dit alors que tout était possible, puisque Jésus était là, ressuscité.

A ce moment, il s’est dérobé à nous.

Il nous laissait.

Sans lui mais pas démunis.

Il n’était plus là, physiquement mais nous étions forts de sa présence spirituelle, de son Esprit, de la Bible, de la vie fraternelle entre nous.

Désormais, c’est à nous de répandre cette bonne nouvelle et de la vivre.