Dimanche 6 juin 2021

Culte – Église en Mission

Matthieu 28,1820 :« Jésus s’approcha d’eux et leur adressa ces paroles : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. 19 Allez donc : de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, 20 leur apprenant à garder tout ce que je vous ai prescrit. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps. »

Prédication :

La mission de l’Église nous a été rappelée dimanche dernier par Denis, dans sa prédication sur les derniers versets de l’Évangile de Matthieu : « Allez donc : de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit… » (Mt.28,19) 

Le baptême, dans ce verset, est associé à « faire des disciples » : il est, en quelque sorte, le signe d’appartenance à la communauté des disciples, le signe d’appartenance à l’Église…

C’est aussi ce que nous disons dans nos liturgies de baptême – en présentant l’enfant ou l’adulte baptisé à l’assemblée : « Frères et sœurs, voici N., Il (elle) est ici chez lui (elle)… ».

La dimension communautaire du baptême est importante, car elle atteste que le baptême n’est pas seulement une « affaire privée », ou seulement une fête familiale, mais qu’elle fait de nous un membre de l’Église.

Cependant, être membre d’Église n’est pas un but en soi. La suite du texte de Matthieu précise que le baptisé doit aussi « apprendre » les paroles de Jésus (cf. Mt.28,20) : il s’agit de transmettre l’enseignement du Christ.

« Le Règne de Dieu est tout proche ! » annonçait Jésus dans l’évangile de Marc : « Changez de vie et croyez à la Bonne Nouvelle » (Marc 1,15). …

« La mission de l’Église est de rendre témoignage à l’humanité entière, en paroles et en actes, de l’Évangile de la venue du Royaume de Dieu ». C’est ainsi que le formule un texte de la Communion d’Églises Protestantes en Europe, cité dans l’article de Bettina Schaller « L’Église et sa mission »…: « L’Église n’existe pas par elle-même, ni pour elle-même . L’Église est, en paroles et en actes, servante dans le monde, à la fois de Dieu et des hommes » 1

Pour approfondir un peu ce que veut dire pour nous et notre Église « rendre témoignage de l’Évangile », je vous propose ce matin d’interroger un des premiers témoins et prédicateur de l’Évangile : l’apôtre Paul. Dans son Épître aux Corinthiens, il donne sa compréhension de l’Évangile de Jésus-Christ :

Lecture 1 Corinthiens 1, 17.26 – 2, :

17 Le Christ ne m’a pas envoyé baptiser : il m’a envoyé annoncer la bonne nouvelle, et cela sans utiliser le langage de la sagesse humaine, afin de ne pas priver de son pouvoir la mort du Christ sur la croix.

26 Considérez, frères et sœurs, qui vous êtes, vous que Dieu a appelés : il y a parmi vous, du point de vue humain, peu de sages, peu de puissants, peu de personnes de noble origine.

27 Au contraire, Dieu a choisi ce qui est folie aux yeux du monde pour couvrir de honte les sages ; il a choisi ce qui est faiblesse aux yeux du monde pour couvrir de honte les forts ; 28 il a choisi ce qui est bas, méprisable ou qui ne vaut rien aux yeux du monde pour détruire ce que celui-ci estime important.

29 Ainsi, aucun être humain ne peut faire le fier devant Dieu.

30 Mais Dieu vous a unis à Jésus Christ et il a fait du Christ notre sagesse : c’est le Christ qui nous rend justes devant Dieu, qui nous permet de vivre pour Dieu et qui nous délivre du péché.

31 Par conséquent, comme le déclare l’Écriture : « Si quelqu’un veut faire le fier, qu’il mette sa fierté dans ce que le Seigneur a fait. »

2, 1 Quand je suis allé chez vous, frères et sœurs, pour vous annoncer le projet de salut révélé par Dieu, je n’ai pas usé d’un langage compliqué ou de connaissances impressionnantes.

2 Car j’avais décidé de ne rien savoir d’autre, durant mon séjour parmi vous, que Jésus Christ et, plus précisément, Jésus Christ crucifié.

3 C’est pourquoi je me suis présenté à vous faible, et tout tremblant de crainte ; 4 mon enseignement et ma prédication n’avaient rien des discours de la sagesse humaine, mais c’est la puissance de l’Esprit divin qui en faisait une démonstration convaincante.

5Ainsi, votre foi ne repose pas sur la sagesse humaine, mais bien sur la puissance de Dieu.

« Ce qui caractérise la vocation de Paul, c’est la conviction profonde d’avoir été appelé pour annoncer Jésus-Christ à toutes les nations (Ga 1,15-16). Avant d’être un organisateur, Paul est un prédicateur. L’essentiel pour lui est l’annonce de l’Évangile. » 2

L’Évangile se résume pour Paul dans ce verset : « J’avais décidé de ne rien savoir d’autre… parmi vous que Jésus-Christ et, plus précisément, Jésus-Christ crucifié » (1Cor2,2).

Voilà l’Évangile à annoncer et à transmettre selon Paul : avoir foi en Jésus-Christ crucifié !

Trois remarques pour comprendre ce qu’est la foi selon Paul :

  1. La foi n’est pas un savoir, accessible aux seuls spécialistes et savants
  2. La foi n’est pas une propriété réservée à l’Église
  3. La foi est le fruit d’une rencontre avec le Christ crucifié

1. La foi n’est pas un savoir, accessible aux seuls savants et bien-portants

C’est dans l’éphémère et la vulnérabilité de notre existence que Dieu se révèle. Dans le non-pouvoir et le non-savoir. La croix du Christ en est le signe.

La foi ne donne pas accès à la vérité absolue.

Elle ne nous donne pas un savoir sur Dieu de façon objective.

Elle ne nous apporte pas la preuve scientifiquement vérifiable que Dieu existe.

Mais c’est justement, et paradoxalement ainsi que la foi est et reste accessible à tous et à chacun·e – et nous permet d’en être témoin grâce à la puissance de l’Esprit : « … je me suis présenté à vous faible, et tout tremblant de crainte », écrit Paul aux Corinthiens, « mon enseignement n’avait rien des discours de la sagesse humaine, mais c’est la puissance de l’Esprit divin qui en faisait une démonstration convaincante » (1Cor2, 3-4) !

Quant à la sagesse humaine, elle est rendue à ce qu’elle est : une illusion qui fait oublier à l’homme son statut de créature, sa condition faite de fragilité, d’incertitude et de précarité. Et c’est bien là le lieu où Dieu désire nous rencontrer et nous aimer.

Rendre témoignage à l’Évangile est alors annoncer la vie en plénitude pour chacun et chacune de nous, gens simples, ordinaires, pas très savants, limités dans nos capacités…

2. La foi n’est pas une propriété réservée à l’Église

Une dérive possible de la foi est de la transformer en un « savoir » dont nous serions les propriétaires. Comme si la foi ne pouvait se rencontrer que dans l’Église – de préférence la nôtre ! Hors de l’Église, point de salut !

Or, Dieu, le Dieu de la Bible et de l’Évangile ne se laisse pas enfermer, ni dans un temple, ni dans une institution, ni dans une doctrine – et encore moins dans une morale !

Si nous pouvons parler de lui, proclamer son Évangile dans et pour le monde, c’est parce qu’IL nous a parlé en premier – en nous révélant son visage de Père aimant en Christ : « Dieu vous a unis à Jésus-Christ et il fait du Christ notre sagesse » (1Cor1, 30).

En fait, la foi n’est jamais le fruit d’un travail humain. Bien sûr, nous pouvons et devons réfléchir, travailler, lire les textes bibliques, approfondir les conséquences de l’amour de Dieu pour nous, dans notre vie. Mais cela ne doit jamais nous faire oublier que la foi n’est pas notre œuvre, mais l’œuvre de Dieu lui-même. C’est Lui qui a choisi, dit Paul. Il a choisi ce qui est faible pour confondre les forts. Il a choisi ce qui ne vaut rien aux yeux du monde pour détruire ce qui est important aux yeux du monde.

La foi est l’œuvre de Dieu en nous. Cela doit nous remplir de reconnaissance et nous rendre très humbles quand nous réfléchissons à la Mission de l’Église. Je poserais ainsi la question :

Comment l’Église peut-elle faire écho à ce don de Dieu, sans jamais y faire écran ?

3. La foi est le fruit d’une rencontre

Si Paul manifeste tellement d’assurance dans sa prédication, c’est qu’il a fait une expérience unique.

Vous connaissez peut-être ce récit du livre des Actes, où Paul devient aveugle pendant 3 jours, suite à la révélation du Christ dans sa vie.

Alors qu’il avait pour mission de rechercher les chrétiens pour les mettre en prison, il a été « renversé » sur le chemin de Damas par la voix du Christ lui-même.

Paul, toute sa vie durant, s’appuiera sur cet évènement qui fondera sa prédication.

Bien sûr, c’est l’histoire de Paul et pas la nôtre. Mais chacun de nous, à notre manière, nous pouvons nous appuyer sur tel ou tel évènement, peut-être extraordinaire, mais peut-être tout à fait banal, une rencontre très simple, ou une conviction intérieure, une délivrance, un nouveau départ… quelque chose qui pour nous, nous a convaincus de la présence de Dieu dans notre vie, à cet instant-là.

La mission de l’Église, ce n’est pas de mettre en avant des gens exemplaires, ni des expériences extraordinaires.

Non, il s’agit de « témoigner » tout simplement de MA rencontre avec Jésus·le Christ.

Une rencontre toute simple peut-être. Par le moyen d’un messager de Dieu, ces anges qui voyagent incognito avec des déguisements improbables…

Amen.

1L’Église et sa mission. Bettina Schaller dans Grains à moudre. Dossier synodal, p.8.

2 Annexe 6 : Elian Cuvillier, « Bible et ministères. Ministères et organisation des communautés dans les épîtres de Paul. »