Sacre Pierre !

Lectures :

Actes 2 / 14 – 41

 

Prédication :

 Sacre Pierre !

Il a bien réussi son coup : 3000 convertis, baptisés en un seul jour ! Imaginez un peu : si cela devait se produire au sein de notre paroisse, on serait largement dépassé au Centre 72, … à moins de louer le stade de Colombes !!!…

Et pourtant, c’était loin d’être gagné d’avance !!

Car le Pierre, voyez-vous, ce n’était pas vraiment un doué de la parole ! Et pas non plus un intellectuel, à non, ça non !

C’était plutôt un pragmatique : genre artisan. C’est un ancien pécheur, en fait, un homme de métier, qui sait mieux se débrouiller avec ses deux mains qu’avec la langue.

Et costaud aussi : vous vous souvenez ? Le coup de l’épée qui a failli trancher la gorge à ce militaire lourdement armé, c’était lui !!! Tiens, d’ailleurs, si Jésus l’avait laissé faire ce soir-là, pour sur, il n’aurait pas terminé la nuit dans les geôles du Grand Inquisiteur … euh, du Grand Prêtre, je voulais dire … (j’ai du me mêler les pinceau et d’époque….mais bon, c’est presque pareil, quoi !)

Mais je m’égare, là. … Ce matin, c’est une autre histoire :

Pierre fait son premier grand discours devant les foules, comme une vedette du show-biz ! Il a du transpirer avant ; il a du trembler, même ; ça se trouve, il aurait peut-être voulu faire demi-tour, tellement il tremblait devant tous ces gens ! …

Mais y-avait personne d’autre ce-soir-là !

Et puis : c’était quand-même lui le « président du CA », du conseil des Apôtres !!

Et puis, à vrai dire, il fallait un pragmatique ce soir-là :

Quelqu’un qui ne se laisse pas si facilement emballer par ces exaltés, ces « dévisseurs d’ampoules » Quelqu’un qui sais garder la tête froide devant toute une foule en trans !! …

On aurait dit des « allumés »« Allume-ee-er le feu », ont-ils clamés, … à l’unisson !!!

On aurait dit qu’ils sont tous fumé, et pas que des Lucky Strike !!

Ce n’était pas très sérieux, tout ça : les autorités de la ville ont failli envoyer les CRS, le Corps de Réserve du Sanhédrin !

Ben oui, ça se comprend, quoi : à force de hurler « Allumez le feu ! », chacun avec un briquet à la main, non seulement ces illuminés ont failli mettre le feu à la salle pour de bon, mais en plus, ça failli dégénérer en bagarre entre eux et les autres, les tradis, qui n’aiment pas, mais alors, pas du tout les changements, surtout quand ça provoque du désordre et quand c’est brouillant !!

Si l’on les écoutait, on ferait le culte en hébreu, sois-disant que c’est la langue des ancêtres qu’il faut respecter… Y- sont pas encore arrivé à l’époque moderne, eux ! Ils insistent qu’il faut rester fidèle à l’héritage des anciens, à leurs traditions et à leur langue, alors que tout le monde aujourd’hui parle le grec : c’est une langue moderne, jeune, dynamique et universelle, en plus, que tout le monde comprend – à part nos anciens, bien-sûr !

Si tu veux te faire entendre, si tu veux te faire comprendre, dans le monde d’aujourd’hui, faut parler le grec, je vous dit !! …

Mais les anciens nous disent : ce n’est pas notre culture, ce n’est pas notre tradition, ce n’est, surtout, pas notre religion ! …

Oui, d’accord, d’accord ! …

Mais, parler leur langue, ça ne veut pas dire partager leurs idées, aux Grecs, partager leur mode et tout ça ; ça veut juste dire : se faire comprendre !!!

Et c’est quand-même ça le but, non ? Sinon, ça sert à quoi de causer, si on te comprend pas !

Franchement, moi, j’ai bien aimé son speech !

C’était sincère, honnête et surtout compréhensible, même par des gens qui ne connaissaient pas grand chose à notre religion ; ils l’ont en tout cas aimé ; Pierre a réussit à les convaincre.

Et sans utiliser des techniques de rhétorique particulier !

Non, non, moi je crois, son succès à Pierre, c’est qu’il est honnête, il est sincère.

Il n’est pas comme tous ces pro’ de la com’ qui ne cherche qu’à te vendre le truc de la dernière mode ; ou comme c’est politiciens pourris qui avec tous leurs discours bien construits, lisses et sans failles, ne cherchent qu’à garder leurs pouvoir, leurs sièges, leurs privilèges !!

Tous ces gens qui prétendent être des héros de la vertu et les défenseurs des valeurs, sans jamais avouer leurs erreurs !…

Pierre, lui, n’est pas comme ça : il est un homme du peuple – et il l’est resté !

Il nous comprend. Il parle notre langue.

Il connaît nos soucis, nos problèmes, nos questions !

Il les a lui même traversé : il a connu le chômage, lui aussi.

Il a connu l’échec.

Il sait que la foi n’est pas inébranlable ; qu’elle est traversé des doutes, des mises en questions et d’infidélités !

Il n’a jamais nié ce qui a du être le moment le plus sombre – et le plus honteux dans sa vie de croyant : la nuit, où il a trahi le maître !!

Il n’en a jamais fait un secret. Il n’a jamais cherché à le cacher !

Il l’a reconnu.

Quand il dit – en parlant de Jésus :

« Vous l’avez livré et supprimé en le faisant crucifier par la mains des impies », il reconnaît sa part de responsabilité !

Il sais et il le dit que c’est aussi, en partie, à cause de sa trahison, à cause de son infidélité !

En même temps, on sens bien chez lui qu’il a fait tout un cheminement de retour sur lui-même – de pour ne pas en rester là, justement !

Il a fait son chemin de pénitence, quoi, et le Seigneur lui a pardonné !

Plus que ça même :

Le Seigneur a continué à lui faire confiance, là où Pierre lui-même a abandonné toute confiance !

« Simon, fils de Jean », lui a dit le Seigneur ressuscité, « m’aimes-tu ? » Et Pierre lui répond : « Oui, Seigneur, tu sais que je t’aime ».

Alors Jésus lui dit : « Sois le berger de mes brebis ! » (Jean 21,16).

Si le Seigneur lui a dit ça, s’il lui a confié cette responsabilité, ce n’est pas parce que Pierre aurait été un « héros de la foi », sans faille, sans le moindre doute, sans faute.

Mais c’est parce que Pierre, au contraire, connaissaient ses limites ; il savait que ça foi n’était pas exemplaire – et le Seigneur le savait aussi !

Mais il savait aussi que tout ce qu’il serait capable de faire dans sa vie de croyant, ce n’est pas grâce à sa propre foi, grâce à ses propres forces limitées, mais grâce à cette foi, grâce à cette confiance que le Christ continuait a mettre en lui.

« Tu es Pierre », lui avait dit le Seigneur, « et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et la Puissance de la mort n’aura pas de force contre elle » (Matthieu 16,18).

Comme il a dit aussi à Paul :

« Ma grâce te suffit ! Ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse » (2 Corinthiens 12,9)

 

Amen

Pasteur Andréas Seyboldt