Prédication culte du 11 mars 2012

Psaume 145

Math 6 : 5-15

Luc 11 :1-4

Rom 8 :26+27

 

Le Notre Père : Jésus partage Sa prière avec nous

 

 

La prière que nous appelons « le Notre Père », selon les deux premiers mots de cette prière, nous accompagne tout au long de notre vie chrétienne

Beaucoup parmi nous l’ont appris dès leur tendre enfance.

Cette prière est d’ailleurs assez simple et courte pour qu’un enfant l’apprenne et en cela elle porte déjà la marque de Jésus !

Jésus cherchait avant toute chose la simplicité dans notre relation avec Dieu, cette relation si souvent compliqué pour nous.

 

Le Notre Père est la prière de TOUS les chrétiens.

Et cela quelque soit leur église, leur confessions ecclésiale, leur langue ou leur culture.

C’est la prière œcuménique par excellence, au-delà de nos diversités et de nos divisions !

C’est la prière de l’église universelle.

 

Mais cette prière qui est LA prière de l’église, dépasse en même temps l’église et nous ouvre à toute l’humanité : Père que ta Volonté soit faite sur toute la terre.

Et la prière finale ‘Délivre nous du Mal est comme un cri lancé vers Dieu de toute l’humanité face à la réalité du mal et de la souffrance des hommes.

 

C’est peut être la seule prière que nous connaissons tous par cœur !

Nous la disons souvent sans trop réfléchir à ce que nous disons, d’une manière un peu automatique. Le Notre Père risque dès lors de se transformer dans une sorte de prière rituelle de notre culte et de notre liturgie.

C’est peut être inévitable : c’est bien sûr le risque de toutes les choses qui se répète souvent. On finit de les dire ou faire sans trop y réfléchir….

 

Mais ainsi le danger nous guette de prier cette prière avec nos lèvres seulement et non plus avec notre cœur. De dire une prière rituelle et non plus une prière qui nous engage, qui nous place réellement devant Dieu, le Dieu de Jésus Christ

C’est dommage parce que la prière devrait engager notre vie et nos actes si elle veut être une prière vraie. Et le Notre Père est bien parmi ces prières qui engagent sérieusement notre vie, si nous la prions sérieusement, conscients des paroles que nous disons.

 

Voilà une bonne raison pour revenir de temps en autre au sens profond de cette prière, de dépoussiérer les mots et de la dé-ritualiser en quelque sorte ; pour lui redonner la force et la vigueur dans notre vie chrétienne qu’elle mérite. Celle que Jésus a souhaité.

 

Cette prière est d’ailleurs tellement dense et riche que nous n’avons jamais fini de la méditer. Comment s’en étonner : elle a jailli du cœur de Jésus lui-même. Elle nous mène droit au cœur de l’évangile. Cette prière est comme l’a dit très justement un Père de l’église « un résumé de l’Evangile ».

 

En effet les grandes thèmes du message de Jésus s’y retrouve presque tous : d’abord la paternité de Dieu, la venue du Royaume de Dieu, la recherche de faire la volonté de Dieu, le pain et la nourriture de l’homme, le pardon reçu et donné, le combat contre le mal et la souffrance des hommes, la tentation et donc la faiblesse de l’homme et enfin la gloire et la puissance de Dieu.

Le Notre Père est en effet un résumé de l’évangile. C’est pourquoi cette prière est si dense et si riche.

 

Et pourtant si courte : toute est dit en quelques paroles, quelques phrases seulement !

Huit en tout, sans compter la doxologie ( à Toi la Gloire, le règne et la Puissance ) que l’église a ajoutée en fidélité à toute prière juive qui termine avec une doxologie.

Jésus savait se résumer, aller à l’essentiel.

Jésus est bien celui dont toute la vie est tendue vers l’essentiel.

Sa prière, sa spiritualité en porte la marque.

« Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et Sa Justice et tout le reste vous sera donné ».

Jésus donne à ses disciples une prière qui veut orienter leurs vies vers cet essentiel :

Notre Père que ton règne vienne, que ta volonté se fasse en nous, donne nous notre pain quotidien, pardonne nous nos offenses, délivre nous du mal….

 

Vous avez remarqué d’ailleurs en écoutant toute à l’heure les deux versions du Notre Père, celle de Mathieu et de Luc : celle du dernier est encore plus brève que celle de Mathieu.

Chez Luc nous n’avons pas « Qua ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel » ni Délivre nous du Mal.

 

Disons pour l’instant que cela s’explique par le fait que les paroles de Jésus sont venues jusque aux évangélistes par différentes traditions orales.

La version de Mathieu, intégrée au cœur du grand sermon sur la montagne, est devenue celle de l’église universelle.

Mais la version plus simple de Luc, beaucoup moins connue, reflète encore mieux la brévité de la prière de Jésus, une prière qui dit l’unique nécessaire et rien de plus.

 

C’est Luc aussi qui nous situe, le moment et les circonstances qui ont amené Jésus à enseigner cette prière à ces disciples.

Un jour un disciple voit Jésus prier et lui dit « Seigneur apprend-nous à prier comme Jean l’a fait à ses disciples ».

Les disciples font bien sûr référence à Jean Baptiste qui avait aussi un cercle de disciples. Malheureusement nous ne savons rien sur une telle prière des disciples de Jean Baptiste. Mais de ce texte on peut conclure qu’il leur avait donné une prière spécifique qui exprimait sa foi et son espérance.

 

La prière que Jésus va donner, à son tour, à ses disciples, le Notre Père, va exprimer ce qui est pour Jésus lui-même, sa foi et son espérance.

C’est sa propre spiritualité qu’il propose à ses disciples.

En effet, cette prière se veut aussi un chemin de voir et de croire COMME Jésus, de vivre et d’agir COMME Jésus.

 

C’est donc en voyant Jésus prier qu’un des disciples ose demander à Jésus « Seigneur apprend nous à prier ». Il faut comprendre « apprend nous à prier COMME Toi. Comme toi tu prie l’Eternel, ton père comme tu aimes dire, apprend nous à prier aussi »

 

Voilà qui est une demande à la limite de l’indiscrétion.

Parce que c’est demander à Jésus de se livrer, de se dévoiler, de se mettre à nu en quelque sorte sur ce qui est peut être la part la plus intime de sa vie : sa relation avec Dieu, avec son Père, telle qu’il la vit dans la prière.

 

Je crois même que Jésus avait une certaine pudeur, une saine pudeur dans ce domaine là.

Les évangiles nous disent souvent comment Jésus s’isole des autres pour prier, parfois dans la nature, en montagne, parfois il prie dans la nuit dans un endroit isolé.

 

Nous avons entendu Jésus dire dans l’évangile de Mathieu « Quand tu veux prier entre dans ta chambre, ferme la porte et prie ton père dans cet endroit secret ».

Pas si évident donc cette question : « Jésus apprend nous à prier comme Toi » Ce qui revient à dire « ouvre nous la porte de la chambre sécrète de ta relation avec Dieu »

 

Mais Jésus ne refuse pas. Il ne peut pas refuser.

Parce que sa raison de vivre est justement d’amener les hommes vers Dieu ; vers une relation nouvelle avec Dieu, appelé Père. Et à partir de cela vers des relations nouvelles entre les hommes, qui enfin se considèrent tous frères.

Jésus fait donc le don, le cadeau aux hommes de sa propre prière pour leur apprendre à prier et surtout pour leur apprendre à vivre sous le signe de la paternité de Dieu et de la fraternité des hommes.

 

On peut se demander pourquoi Jésus n’a-t-il pas pris l’initiative lui-même d’enseigner cette prière aux disciples ?

Bonne question !

J’essaie une réponse. Sans savoir si c’est la bonne.

La prière fait pour Jésus partie de ces choses qui ne s’imposent pas. Croire, prier, se tourner vers Dieu contre sa liberté n’a pas de sens.

Dieu nous veut libre. Il veut des hommes et femmes qui entrent librement en relation avec Lui.

Il faut donc bien que l’homme désire de se confier à dieu et décide de frapper sur la porte de Dieu.

 

Dieu ne nous force jamais.

Parce que Dieu est amour. L’amour respecte et suscite la liberté. L’amour suscite aussi le désir. Jésus a suscité auprès de ses disciples le désir de prier comme Lui.

C’est en voyant Jésus prier que le désir des disciples est éveillé : « Seigneur apprend nous à prier ».

 

Cette demande est en même temps un AVEU : « Seigneur nous ne savons pas prier ». « Apprend nous à prier ».

Nous sommes comme ces disciples. Nous aussi nous désirons prier et nous ne savons pas prier ou mal prier.

 

Pendant la prière commune ou communautaire nous nous sentons encore soutenu par les paroles de la liturgie, de la bible, ou celui qui préside le culte.

Mais prier seul est difficile. C’est vrai pour tous, pour moi, pour vous, pour chacun de nous.

Nous ne savons pas prier comme il faut, dit Paul. Il a raison !

Quand nous prions seul nos pensées sont distraites, notre cœur rempli de mille choses autres, notre foi en Dieu est hésitante, notre temps compté et limité et nos activités trop pressantes ou oppressantes.

 

D’où l’impression récurrente que notre prière comme un fusil qui ne veut pas décoller ou une fois décollé retombe aussi vite sur terre. D’où ce sentiment de frustration, d’impuissance qui accompagne si souvent notre prière.

« Seigneur tu connais notre faiblesse ! Viens au secours de notre faiblesse. Seigneur apprend nous à prier».

 

Jésus connaît notre faiblesse en ce qui concerne la prière…..Dieu Merci il en tient compte.

Là aussi il est venu à notre secours. Là aussi Jésus ne nous abandonne pas.

Il nous a donné une prière…. sa prière. Une prière ou tout est dit de ce qui devrait être notre prière devant l’Eternel. En huit simples phrases.

Cette prière vient du cœur de Jésus lui-même.

 

Quand nous ne savons pas prier avec nos mots – peut être à cause des souffrances que nous portons ou simplement parce que nous n’arrivons pas à être présents à nous-mêmes,

il nous arrive de nous accuser nous mêmes,

de nous culpabiliser, de nous décourager, de nous sentir abandonné de Dieu, ….

Dans de tels moments nous pouvons toujours choisir de prier le Notre Père.

De le prier tout simplement.

C’est la prière la plus vraie qui soit, celle venu du cœur de Jésus et qui va droit au cœur de Dieu.

 

Ma prière sera ainsi une prière belle et agréable devant Dieu, malgré ma propre prière qui était restée pauvre, confuse ou distraite,

même si Dieu me semble en ce moment à cent mille années de lumière dans ma vie.

Parce que j’ai prié simplement les paroles de Jésus lui-même.

J’ai prié avec lui le Père. En disant ces paroles, c’est peut être même Jésus qui prie en moi.

 

Chers frères et sœurs en Christ,

Retenons peut être ce matin ceci : le Notre Père, que nous disons si souvent au culte ou dans des réunions d’église, est aussi une prière qui peut soutenir, nourrir, enrichir notre prière personnelle.

Et ainsi renouveler notre vie spirituelle et notre engagement chrétien.

 

Cette prière se propose à tous. Elle est à la portée de tous.

Dans n’importe quelle situation de la vie. A n’importe quel moment : je peux rejoindre

Jésus lui-même dans sa relation avec le Père par cette prière et laisser Jésus prier en moi

Et donc venir en moi par Son Esprit.

Prier le Notre Père c’est accueillir Jésus et son esprit en moi.

Nous ne devrons pas douter de cela une seconde.

 

Et voici une proposition qui peut vous aider pour vous réapproprier cette prière d’une manière nouvelle.

Au lieu de dire « Notre Père » vous pourriez dire « Mon Père ».

Et pareillement pour la suite : vous impliquez vous-même dans chaque phrase de cette prière.

« Mon Père…. que Ton Nom soit sanctifié en moi ; que ton règne vienne en moi

que ta volonté soit faite en moi »

 

Prier le Notre Père ainsi vous permettra d’abord de redécouvrir comment cette prière engage notre vie,

avec Dieu et avec les hommes.

à la suite de Jésus et dans son esprit,

 

Il y a 50 ans Dietrich Bonhoeffer dans son prison à Berlin, quelque mois avant d’être exécuté par les nazis avait médité d’une manière toute à fait prophétique sur la déchristianisation de la société occidentale et sur la manière que la foi chrétienne pourrait survivre à cela.

Et il a écrit ceci : « Le christianisme renaîtra s’il saura retrouver deux choses : la prière et l’action juste, la rencontre avec Dieu et l’agir solidaire envers les hommes. »

 

Pas de renouvellement de la vie d’église aujourd’hui et demain sans renouvellement spirituel

Ni sans des actes concrets de solidarité humaine.

 

Redécouvrons le Notre Père comme cette prière de Jésus, avec Jésus, qui nous engage avec Dieu et avec les hommes.

 

AMEN

 

Le pasteur Andréas LOF