Les communautés de paix du Bas-Atrato, en Colombie

Vivre en paix en Colombie

Depuis plusieurs années, les guérillas, les groupes paramilitaires et les narco-traficants font régner un climat d’insécurité en Colombie, particulièrement dans les campagnes. En 1997, de nombreux paysans (d’origine noire en majorité, parce que descendants d’esclaves échappés des Caraïbes) ont fui les violences du nord-ouest du pays(départements du Chocò et d’Aniquia) pour se réfugier vers le sud.

Un processus de retour a été mis en place avec l’aide du Centre d’investigation et d’éducation populaire et de l’Eglise catholique (au travers du diocèse d’Apartado et de la paroisse de Riosucio). Après négociations avec les groupes paramilitaires et les guérillas (Farc, ELN), 49 villages ont été déclarés communautés de paix de San Francisco d’Asis, le 19 octobre 1997. Aujourd’hui, trois grands ensembles de communautés de paix existent, réunissant environ 5 000 habitants dans près de 60 villages. Ils se caractérisent par un refus des violences, des conflits armés et d’une économie basée sur le trafic de drogue. Cette organisation représente un grand intérêt pour les populations : sécurité, assistance psychologique, éducation, soutien spirituel (encadrement par l’église) et physique (travail en collectivité). La loi colombienne 70 de 1993 reconnaît le caractère ethnique de ces populations et constitue un instrument juridique pour la revendication de leurs droits (protection de l’identité culturelle) et pour la défense de leur territoire (respect des pratiques traditionnelles de production et droit à la propriété collective). Elle permet ainsi aux villages de récupérer leurs terres et de se développer.

Les villages que soutient le groupe Acat sont surtout dans le Chocò, une région recouverte d’une selva (une immense forêt traversée par de nombreuses rivières), riche en eau douce et disposant de la plus grande biodiversité naturelle. La circulation n’est possible que sur l’eau. Les villageois se réunissent en conseil pour résoudre leurs problèmes. Ils ont dû rebâtir leurs maisons qui sont sur pilotis ; ils ont créé des écoles, des ateliers (par exemple de couture, de menuiserie), mais il est très difficile de se soigner car les médecins sont très rares. Les villageois doivent aussi se reconstruire (processus de résilience) pour retrouver le sens de la vie et le respect de l’autre.

Le conflit entre l’armée, les groupes paramilitaires et les guérillas n’a pas cessé pour autant. Récemment, des assassinats ont été perpétrés sur des membres actifs des communautés. Quelques groupes convoitent en effet leurs terres pour faire de l’huile de palme. Face aux diverses violations, parfois extrêmes, dont sont victimes les populations, les communautés se sont regroupées en une association, l’Ascoba (pour Association des communautés du Bas-Atrato), qui les guide depuis 2003. Elle est notamment aidée par un comité de soutien français dont fait partie l’Acat-France. Un humanitaire, Olivier Lagarde, travaille dans ces villages grâce à ce comité. Son témoignage, fait à la demande des communautés, dévoile leur combat : « Le simple fait de “visiter” les communautés à travers les commissions donne du courage aux gens (…) Il est important de sentir le soutien moral, politique, économique de nos frères de France. Cela permet de donner de la confiance aux gens. » Le soutien européen entraîne en effet une certaine écoute des paramilitaires et il garantit parfois une relative sécurité. Toute personne qui les soutient agit comme un « tuteur de plante ».

Le soutien du groupe Acat consiste surtout à faire connaître ces communautés de paix, car elles ont encore beaucoup de chemin à faire, et à les soutenir financièrement, car les villages manquent de moyens pour l’éducation, la santé, le logement et le développement agricole. Avec l’Acat-France, nous faisons aussi pression sur les autorités colombiennes (pétition, lettres). L’an passé, notre groupe a pu envoyer 1 700 € à l’Ascoba via le comité de soutien, grâce notamment au concert d’Erzsebet Tassin et Olivia Pfender au Centre 72 et à l’opération Bol de riz de l’institution Jeanne d’Arc de Colombes. Nous devons continuer à agir pour ces villageois qui ont choisi l’action non-violente.

Martine Blanchard

 

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