Lecture Genèse 1, 1 – 2, 4a

Dimanche 29 septembre 2019

Culte avec Cène

Troisième et dernière lecture de ce « premier récit de la création », (qu’il faudrait d’ailleurs plutôt appeler « poème » ou « chant de la création »!) …

Texte tellement riche qu’une seule prédication ne suffit pas d’en explorer le message, qui n’est peut être que multiple, d’ailleurs!

Et pour celles et ceux d’entre vous qui souhaiteraient relire le texte et en partager vos impressions et questions, rendez-vous mardi prochain pour la reprise de nos « rencontres bibliques »!

Prédication :  

Rien sur terre n’est sacré!

Voilà ce qui pourrait être le résumée à la fois, le plus court et le plus juste de ce « premier récit biblique de la création ».

Rien sur la terre n’est sacré, cela sonne à l’époque de sa rédaction original comme une polémique, une provocation dangereuse à l’adresse du pouvoir religieux et politique de l’époque !

Nous l’avons déjà vu à l’occasion de notre première lecture du texte le 1er septembre dernier:

Dans l’Égypte antique des Pharaon, une des deux grandes superpuissances « mondiales » des temps bibliques, le soleil était vénéré comme un dieu, voire même comme le dieu suprême de l’univers – et le pharaon était considéré comme son fils!

Or, dans ce « poème biblique de la création », le soleil, non seulement, n’est pas mentionné avec son nom reconnu, mais se trouve relégué à un statut de … simple lampadaire, accroché « dans la voûte céleste ».

Il n’est créé, par ailleurs, que le quatrième jour – bien après la lumière, créée le premier jour.

D’autres « créations » n’ont visiblement pas eu besoin d’attendre le soleil se lever pour venir à l’existence. Ainsi, la voûte céleste, le ciel, ainsi que la mer et la terre, la verdure et les « arbres fruitiers » ont été créés avant le soleil!

Il en est de même pour la lune – déesse des religions du Proche Orient, tout comme les étoiles, évoquées, entre autres, dans le récit des mages de l’Évangile de Matthieu: tout comme le soleil, elles se trouvent reléguées au niveau de simples lampadaires – sans être nommé par leur nom propre.

Ceci pour empêcher toute confusion avec un quelconque statut de « divinité ». Ils doivent leur existence uniquement à leur fonction: celle « d’éclairer la terre »!

Leur pouvoir, leur « domination » sur la création et sur l’humain en particulier, est limité. Ils n’ont pas le pouvoir de prédire l’avenir ni de décider sur le « destin » de l’humain! …

C’est pour cela que nous confessons:  « Aussi, je ne crois à aucune fatalité, ni celle de la guerre, ni de la haine, ni de la catastrophe, ni même de la mort »….

Rien sur terre et dans l’univers n’est sacré: ni le soleil, ni la lune, ni les étoiles, ni la flore, ni la faune – mais toute créature  a son importance et sa place dans la création, indispensable pour l’ensemble de la création:

De la plus petite herbe des champs à l’arbre mammouth des forêts canadiennes, dont les branches semblent toucher la voûte du ciel…

De la plus petite abeille dans nos ruches de ville à la baleine bleue de l’océan atlantique (considérée comme le plus gros animal ayant jamais vécu sur notre planète).

Certes, on peut s’interroger sur l’utilité bénéfique moustiques ou des cafards. Mais je suppose que les biologistes pourraient bien nous expliquer pourquoi et pour qui leur existence est bénéfique aussi!

Malgré une connaissance des sciences naturelles limitée à son époque, le récit biblique de la création suggère l’interdépendance des créatures, en particulier lorsqu’il évoque une sorte de chaîne alimentaireoù « toute herbe porteuse de semence, … tout arbre fruitier… » et « toute herbe verte »(vv.29-30) sert de nourriture aux animaux et aux humains.

Il y a donc, interdépendance des espèces entre eux – ce que soulignent avec insistance de nos jours les biologistes lorsqu’ils alertent sur l’extinction d’un certain nombres d’espèces qui a déjà commencé!

En même temps, au sein de la création « bonne » de Dieu, il n’y a pas de collusion ou de concurrence entre les espèces!

Les relations entre oiseaux, poissons, animaux terrestres et humains ne sont pas régies par la violence du « s’entre-tuer ».

La dominance accordée à l’humain sur les autres espèces, n’inclut pas une « licence pour tuer »!

Nous l’avions déjà évoquée lors de notre première lecture du récit: la nourriture prévue pour les humains – et les animaux – est uniquement végétarienne!  …

Voilà, le plan!

Le plan initial de la création, voulu par Dieu et qu’il appelle « bon » et même « très bon »!

Hélas, ce n’est pas la réalité, comme nous le savons et expérimentons – et il ne s’agit nullement de revenir à cet état idéal d’une création sans conflits, sans violence, sans contraintes et, au fond, utopique : trop beau pour être vrai! …

En revanche, il s’agit bien, pour nous humains, de garder en mémoire deux éléments, à la fois, constitutifs et complémentaire de ce « plan initial » de Dieu.

Ils nous permettraient de (re)trouver notre place particulière au sein de la création bonne de Dieu. Elles nous permettraient de vivre mieux (de nos jours il faudrait plutôt dire survivre!)  de façon plus harmonieuse et plus bénéfiques pour les autres espèces de la planète!

Premier élément : comme le soleil, la lune, les étoiles, comme les plantes, les arbres et les animaux, les humains, ne sont fondamentalement pas autre chose que créatures – ce que confirment bien aussi les sciences humaines d’aujourd’hui! En tant qu’ « êtres vivants » – de l’espèce des mammifères comme nous le précisent les scientifiques – nous partageons avec les autres mammifères animales une même interdépendance avec notre environnement naturel et les autres espèces qui y vivent.

Nous partageons, avec eux, un même espace de vie en dehors duquel nous ne pourrions pas vivre.

(Et, fondamentalement, notre droit de vivre n’est pas supérieur aux plantes et aux animaux! Dans d’autres spiritualités, notamment celle des Amérindiens, cette interdépendance entre la nature, les animaux et l’être humain se trouve encore d’avantage soulignée!) …

Deuxième élément: l’humain a, au sein de la création une place – et une responsabilité! – particulière : celle de « dominer » sur les autres êtres vivants: oiseaux, poissons et animaux terrestre.

Mais cette domination doit s’exercer dans le respect de la vie de ces autres animaux et de leur « espace vital »! …

Certes, la création de l’humain a cela de particulier qu’elle est « à l’image de Dieu » et à « sa ressemblance ».

Mais, comme nous l’avons déjà pu constater lors de notre première lecture, cette ressemblance n’est ni « physique » ni « étatique », mais relationnelle: Dieu crée l’humain « à son image » pour entrer en relation avec lui, pour être en dialogue avec lui.

Comme Dieu, l’humain est un « être de Parole »: de parole partagée dans un face à face libre et sans contrainte…

Alors, oui, rien n’est sacré – sur terre et dans les cieux… rien n’est sacré non plus dans ce que l’humain crée et réalise en tant qu’être « dominant » la création: ni ses réalisations matérielles de « produits de consommation » divers et variés, ni ses réalisations immatériels d’idéaux, de lois, de règlements – du « manifeste communiste » à la « loi du marché »!

Rien n’est sacré, sauf, et vous l’avez peut-être déjà remarqué: le « septième jour » – appelé « shabbat » en hébreu: « Dieu bénit le septième jour et en fit un jour sacré » (Gen2,3). … Pourquoi?

Parce qu’il est le moment privilégié du « dialogue entre Dieu et l’homme »!

Le septième jour a été « créé » par Dieu – spécialement pour l’humain! Pour lui permettre de garder le lien, la relation – et concrètement le dialogue avec Dieu.

Pour lui rappeler que, s’il a une place particulière au sein de la création et sur cette terre, celle de dominer sur les autres espèces, il n’a pas acquit cette place par lui-même –

… par un quelconque mérité ou supériorité « naturelle », mais uniquement parce que Dieu la lui a confié à « bon escient » pour qu’il y exerce une « domination » responsable et respectueuse de la vie, de toute la vie qui « grouille et fourmille » dans une magnifique variété. …

« Dieu vit alors tout ce qu’il avait fait: c’était très bon »! (Gen1,31)

Amen.

Pasteur Andréas Seyboldt