Comment s’engager ou le choix de David par Samuel

Dimanche 11 octobre 2015

Texte biblique : 1 Samuel 16, 1-13

David_Samuel

Comment s’engager dans la foi ? Faire l’offrande à Dieu de notre énergie, de nos capacités ?

Et qui en est digne ?

Dans notre histoire, Samuel est un vieil homme.

Il se plaint, il pleure Saül : « Samuel pleurait Saül, car le Seigneur s’était repenti d’avoir fait régner Saül sur Israël. »

Remarquons que parfois, Dieu lui-même se repend.

La première fois, c’était après le déluge.

Dieu se repentait d’avoir reproché à l’homme d’être … ce qu’il est, à savoir ambigü, partagé, « enclin au mal ». Désormais, il ferait alliance avec l’homme et tot ce qu’il charrie.

Ici, Dieu se repend, non d’avoir accepté un roi, mais de cette première expérience de royauté qui ne donne pas vraiment satisfaction.

Quant à Samuel, il s’est mis en retrait.

Le temps de sa jeunesse est révolu, le temps où il se réjouissait de se mettre au service du Seigneur est derrière lui. Le temps où son action comptait est passé.

Il a désigné un roi, Saül, et ce dernier est de plus en plus caractériel, instable, désobéissant.

Aujourd’hui, tout va de travers.

Ce que Samuel avait mis en place ne fonctionne plus.

Saül s’est à ce point écarté du projet de Dieu que le Seigneur, à son tour, l’a mis à l’écart.

Samuel ressent un mélange d’abandon, de tristesse, de nostalgie peut-être.

Parce qu’il a échoué, parce qu’il est âgé, est-il encore digne de servir ?

A-t-il encore une quelconque utilité ?

C’est dans ce contexte que Dieu intervient auprès de Samuel : « vas-tu longtemps pleurer Saül ?»

Cette question retentit comme une mise en route, un envoi : Lève-toi ! J’ai besoin de toi pour désigner le futur roi. J’ai encore besoin de ta parole, de ta présence, de ton action. Lève-toi, remplis ta corne d’huile et va.

Dans le récit, on met en évidence le choix de David. Mais il est utile de rappeler que l’histoire commence par le rappel d’un ancien, de quelqu’un qui pensait avoir fait son temps.

Pourtant, c’est à lui, l’ancien,que Deu fait appel.

C’est à lui qu’il demande de sortir de sa retraite et de sa complainte pour aller chercher David.

Dieu appelle qui il est veut, quand il veut, y compris celui qui, comme Samuel a le sentiment d’être indigne et dépassé.

Dieu ne trie pas suivant notre passé, notre tranche d’âge, notre sentiment.

Il nous appelle à le servir, avec ce que nous sommes.

Et la vraie question n’est pas de savoir si nous entrons dans les bonnes cases de compétence, de tranche d’âge ou de personnalité.

La vraie question n’est même pas de savoir si nous en sommes dignes.

Je dirais même que si la question de la dignité, choisie pour ce jumelage, est une question pertinente socialement, économiquement, psychologiquement; mais qui n’a aucun sens spirituellement.

Aucun de nous n’est digne en tant que tel car aucun de nous ne vit totalement l’Evangile.

Par contre, chacun de nous est déclaré digne par Dieu.

La seule question est donc de savoir si nous écoutons cet appel; si nous répondons à cet appel, si nous nous mettons en marche.

Alors, sommes-nous-prêts à entendre Dieu nous dire, comme à Samuel : « Vas-tu longtemps pleurer ? Vas-tu longtemps de complaire dans la nostalgie, la peur de l’avenir, le sentiment d’avoir été maltraité par la vie, la conviction qu’il y a plus compétent que toi, plus expérimenté, plus disponible ? Vas-tu longtemps te trouver des excuses pour ne pas me suivre, moi, l’Eternel ? « 

Dans notre récit, Samuel sort de sa torpeur nostalgique..

Il se lève.

Pour autant, ce n’est pas sans crainte.

Son chemin va croiser celui de Saül, si imprévisible, dangereux.

Comment ce dernier réagira-t-il lorsqu’il découvrira que Samuel est en train de choisir son successeur ?

Samuel exprime sa crainte et Dieu ne le lui reproche.pas.

Au contraire, il lui donne une consigne, qui est une ruse, en somme: Ne prend pas des risques inutiles. Vas à Bethléem simplement pour accomplir un sacrifice. Vas-y simplement pour honorer ton Dieu et c’est ainsi que tu inviteras les gens de Bethléem et que tu les rencontreras.

Nous aussi, il nous arrive d’avoir peur : peur d’être en deçà de ce qui nous est demandé, peur d’être exposés au regard des autres, peur d’un avenir qui n’est pas celui que nous avions projeté.

Là encore, Dieu ne nous adresse aucun reproche.

Au contraire, il nous aide à discerner ce qu’il attend de nous, sur quel chemin il veut nous conduire, et comment y arriver, avec ce que nous sommes, avec nos limites mais aussi en repérant et en mobilisant nos ressources personnelles.

Ces ressources diffèrent suivant les individus.

Pour David, ce sera la fougue.

Pour le prophète Amos, ce sera la capacité à se mettre en colère contre les puissants.

Pour Samuel, c’est la prudence expérimentée.

Ainsi, Samuel arrive à Bethléem en prétextant qu’il doit faire un sacrifice et explique, dans un second temps, la raison de sa venue : la recherche d’un roi pour succéder à Saül..

On lui présente la fine fleur du pays, à commencer par le premier fils de Jessé.

Samuel est conquis : une telle force, une telle éducation, un nouveau Saül, en somme !

Alors, Samuel reçoit en lui cette parole de Dieu : « Les hommes regardent aux yeux, mais Dieu regarde au coeœur ».

Et il se tourne David.

Faut-il comprendre qu’il a choisi le meilleur ?

La suite de l’histoire de David ne nous autorise pas à le dire.

Sa vie sera loin d’être exemplaire à tout point de vue.

David est à la fois plein de talents et d’excès.

Pourtant, Dieu le choisit avec ce qu’il est et ce qu’il charrie de contradictions,.

« Dieu voit au cœoeur ».

Voir au coeur, c’est « voir en profondeur »; c’est aussi « regarder avec le cœoeur », avec bienveillance.

Les hommes regardent ce qui saute aux yeux, mais Dieu voit voit plus loin, plus profondément, plus vrai.

Dieu nous voit tel que nous sommes, en vérité. Et ce regard n’est pas à craindre car c’est un regard d’amour, un regard qui repère ce qu’il y a de meilleur en nous.

Le regard de Dieu est comme un scanner surpuissant qui voit instantamment ce qui, en nous, peut être mobilisé, au service de l’Evangile.

Faire confiance à ce regard permet le plus grand des renversements : au lieu de prétexter nos insuffisances ou nos contraintes pour gémir ou rester immobile, mettre à profit ce qu’il y a de bon en nous, ce que Dieu a repéré en nous pour répondre à son appel et nous mettre en marche, avec Samuel, avec David et toute la cohorte des témoins de Jésus-Christ.

« Vas-tu longtemps gémir ? Va, lève-toi, suis-moi, en mobilisant tout ce dont tu es riche »

Amen !