Accueillez-vous les uns les autres,

Eglise Protestante Unie d’Argenteuil, Asnières, Bois colombes, Colombes  le 16-9-2018 

 Accueillez-vous les uns les autres, comme le Christ lui-même vous a accueillis, Romains 15 v 2 à 9

« Que chacun de nous fasse ce qui plaît à son prochain, en vue de ce qui est bon et constructif.

Le Christ, en effet, n’a pas fait ce qui lui plaisait ; mais, ainsi qu’il est écrit, les insultes de ceux qui t’insultent sont retombées sur moi.  Car tout ce qui a été écrit autrefois a été écrit pour notre instruction, afin que, par la persévérance et par l’encouragement des Ecritures, nous ayons l’espérance. Que le Dieu de la persévérance et de l’encouragement vous donne d’être bien d’accord entre vous, selon Jésus-Christ, pour que, d’un commun accord, d’une seule voix, vous glorifiiez le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ !

Aussi accueillez-vous les uns les autres, comme le Christ lui-même vous a accueillis, pour la gloire de Dieu. Car je dis que le Christ est devenu serviteur des circoncis pour la vérité de Dieu, en confirmant les promesses faites aux pères, tandis que les non-Juifs glorifient Dieu pour sa compassion, ainsi qu’il est écrit : C’est pourquoi je te reconnaîtrai parmi les nations et je chanterai ton nom »

 Savez-vous quel est le mot d’ordre ou dit autrement quel est le verset biblique  qui nous accompagne tout au long de l’année 2018 ? Il se trouve écrit en grosses lettres dans le hall du Centre 72.  Oui «  Accueillez-vous les uns les autres comme le Christ vous a accueillis » Et avez-vous souvenir du mot d’ordre de l’année 2017 sur la liberté ? : «  C’est pour nous soyons libres que Christ nous a  libérés » un verset extrait de la lettre aux Galates.

Chaque année en effet, notre paroisse choisit un verset biblique qui est affiché dans le hall mais qui est aussi envoyé sur un carton couleur en début d’année à chacun. Je sais que certains paroissiens sur le mur de leur cuisine ou sur le dessus de leur cheminée gardent d’année et année ces cartons de multiples couleurs aux messages riches d’espérance et de foi ; une belle manière de se laisser porter sur un chemin de foi.

En fait, je voyais l’année 2018 s’écouler sans que nous ayons ensemble pris le temps de réfléchir à cette parole biblique « Accueillez-vous les uns les autres comme le Christ vous a accueillis ». Il m’a semblé en cette période de reprise, de rentrée, de retrouvailles après l’été, d’arrivées peut-être de personnes nouvelles que ce mot d’ordre sur l’accueil était plus que jamais d’actualité.

C’est l’apôtre Paul qui le prononce en s’adressant aux chrétiens de Rome.

Une exhortation qui dans sa construction, son balancement, son contenu même ressemble étrangement à une autre parole biblique cette fois ci située dans les Évangiles : « aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » . Une parole adressée par Jésus à ses disciples dans un de ses discours d’adieu.

Un parallèle entre ces 2 exhortations pourrait être fait avec un commandement : « accueillez-vous ou aimez-vous  » cela dans une dimension mutuelle, les uns et les autres c’est à dire de manière réciproque et partagée. Un commandement adressé aux disciples de Jésus ou aux chrétiens de Rome qui est relié à ce que Jésus le Christ a fait : «  comme je vous ai aimés ou comme le Christ vous a accueillis ».

Prise isolément , en fait cette exhortation ne dit rien sur l’accueil en tant que tel : quel accueil ? Quelle manière d’accueillir ? . Il y a mille et une manières d’accueillir : de manière hautaine, distante, méprisante, désagréable. Le «  comme le Christ nous a accueillis » nous n’en dit pas plus à moins que nous sachions précisément comment le Christ a accueilli et accueille. Et si nous ne le savons pas encore , c’est alors une invitation à lire les Évangiles et à explorer la manière avec laquelle il accueille !

Pour celles et ceux d’entre nous qui ont eu l’occasion de voyager et d’aller à la rencontre de cultures différentes, ils savent qu’il y a bien des manières d’accueillir : avec un collier de fleurs en Polynésie, avec mille génuflexions et courbettes dans les pays asiatiques ; ou en offrant, comme j’ai le souvenir dans le Sud du Tchad, les intestins d’une chèvre, à l’étranger que j’étais ! Encore fallait-il décoder qu’il s’agissait d’un morceau de viande considéré comme le meilleur !

Avant de voir ce que l’apôtre Paul entend par l’accueil et ce que Jésus Christ a manifesté comme accueil, peut être pouvons-nous nous demander quels seraient  pour nous le ou les synonymes les plus appropriés pour le verbe « accueillir « ?  Je vous laisse un instant de réflexion …   En effet c’est un  mot qui rejoint des expériences que nous avons tous vécues d’être bien ou mal accueillis  ou  d’avoir bien ou mal accueilli mais dont les équivalents sont difficiles à trouver.

Que proposez-vous ?  Recevoir, saluer, écouter, partager, reconnaître, exercer l’hospitalité…..merci à vous . J’avais pensé quant à moi » à donner une place », « accorder de l’importance à l’autre », « prêter attention ». Voilà déjà quelques repères sur le chemin de l’accueil.

Mais voyons maintenant pourquoi l’apôtre Paul adresse une telle recommandation aux chrétiens romains. Il écrit à une communauté chrétienne traversée par toutes de sortes de questions plus ou moins importantes sur la nourriture à prendre ou non, sur les fêtes respecter ou non, sur les rites à observer ou non, . Une communauté divisée en différents courants, les uns plus marqués par les observances juives, les autres beaucoup plus libres par rapport à toutes ces pratiques , souvent d’origine païenne.

On se chamaille, on se dispute, on se juge mutuellement, les uns prétendant avoir raison contre les autres ; les uns se considérant comme forts, au-dessus de toutes ces considérations pratiques et estimant les autres comme faibles car attachés à des points perçus comme secondaires. D’où des divisions, des clans, des fractures, des groupes et sous-groupes , où l’on se fréquente entre personnes d’un même avis, du même bord, en excluant ou en déconsidérant ou en dénigrant ceux qui ont des avis, des opinions voire des pratiques un peu différentes.

Et Paul alors de les exhorter tous quels que soient leurs bords, leurs opinions, forts, faibles, chrétiens d’origine juive , chrétiens d’origine païenne, grecque , circoncis, incirconcis à s’accueillir mutuellement, à se recevoir mutuellement, à se reconnaître mutuellement comme des frères et des sœurs.

 Mais précise-t-il « comme le Christ lui-même vous accueillis ». Immédiatement après cette recommandation, dans ce contexte de fortes oppositions  entre chrétiens d’origines différentes, les uns d’origine juive, les autres d’origine grecque, il rappelle que Jésus-Christ s’est fait serviteur aussi bien des juifs, les circoncis que des païens , les incirconcis. Avec lui, pas de considération des origines pour accorder plus d’importance aux uns plutôt qu’aux autres.

Paul en fait dans ce passage n’est pas très explicite sur le comment de l’accueil de Jésus-Christ en tant que tel,  car il l’a été suffisamment avec force détails dans les 11 premiers chapitres de l’Épître de Paul aux Romains . Je m’explique.

On distingue généralement dans la longue lettre de Paul aux Romains deux parties. La première du chapitre 1 au chapitre 11, la partie dite théologique où Paul explore ,détaille, présente la réalité de la grâce manifestée en Jésus -Christ . Puis dans les chapitres suivants, il développe une deuxième partie plus pastorale, plus éthique, plus morale faite de recommandations et d’exhortations. Une deuxième partie où se trouve notre recommandation , conséquence de la première partie.

« Comme le Christ vous a accueillis » dit-il . Mais comment le Christ a t-il accueillis ? , peut-on demandé. La réponse : voyez pour cela la longue et très détaillée première partie !!!

Certes, il ne raconte pas comment Jésus a rencontré l’aveugle Baratinée et l’a accueilli ; ni comment il rencontré et accueilli les dix lépreux ; ni comment il a rencontré et accueilli Zachée ; ni comment il a rencontré et accueilli la Samaritaine mais c’est tout comme. De manière conceptuelle, abstraite, théologique, nous pourrions dire philosophique, il décrit la venue de Jésus-Christ, sa mort et sa résurrection comme événement de grâce, comme manifestation d’un accueil , d’un accueil inconditionnel.

Comment Christ a t-il accueilli ? Le récit des Évangiles nous montre un Jésus attentif à chacun, aux grands, aux petits, gros et maigres, riches et pauvres, malades et bien portants, hommes et femmes et j’ose dire noirs et blancs !! sans considération de personnes, avec la même bienveillance, avec la même écoute, avec le même regard fraternel, . Un accueil sans condition préalable pour rejoindre l’autre dans sa personnalité, son humanité, au-delà des apparences et des idées toutes faites.

Comment Christ a t-il accueilli ? Les onze premiers chapitres de Romains nous présentent Jésus le Christ  comme celui qui nous sauve, en ce sens qu’il nous accorde aussi de manière inconditionnelle cette dignité d’enfants de Dieu, cette identité d’être humain aimé de Dieu. . Pour reprendre le jargon jargonnant de la théologie protestante de la Réforme par ce qu’on appelle le salut par grâce au moyen de la foi, il nous justifie, il nous rend justes, il nous accueille  sans jugement, sans préjugé  comme des fils et des filles de Dieu, comme un homme ou une femme digne de l’amour, de l’amour de Dieu, le Père. Nous sommes accueillis comme des frères et des sœurs du Christ quels que soient notre pédigrée, notre rang social, notre honorabilité, notre compte en banque !

« Accueillez-vous les uns les autres comme le Christ vous a accueillis » 

Ce « comme le Christ vous a accueillis « prend alors pour nous deux sens.

A la fois, le Christ est pour nous un exemple d’accueil, un exemple à suivre, appelés que nous sommes à pratiquer un accueil inconditionnel qui nous fait regarder l’autre comme un frère, comme une sœur, comme une personne à part entière, digne de notre attention, de notre accueil, à rencontrer, à connaître. Le « comme « est un exemple qui place la barre haute mais qui nous mène sur les chemins de la vraie liberté !

Mais le «  comme le Christ nous a accueillis »est bien plus qu’un exemple car alors le christianisme se réduirait à une super morale, impossible à atteindre. Ce « comme » est aussi un élan, un mouvement, une conséquence, un fruit de la grâce , le fruit de l’accueil que Dieu nous réserve et dont nous sommes bénéficiaires en Jésus-Christ. La grâce reçue, l’accueil reçu nous donnent une identité d’enfant de Dieu qui nous décentre de nous-mêmes, nous dé préoccupe de nous-même, nous délivre de nous-même et nous fait regarder l’autre à accueillir comme un être humain  lui aussi aimé de Dieu, accueilli par Dieu.  

« Accueillez-vous les uns les autres comme le Christ vous a accueillis »Une exhortation qui ouvre à la dynamique de l’accueil et de la grâce. Je suis accueilli par Dieu pour devenir accueillant ; tour à tour accueilli et accueillant dans la relation à l’autre ; ce que le beau mot « hôte »de la langue française traduit, à la fois hôte accueilli et hôte accueillant.

Accueillez-vous les uns les autres comme le Christ vous a accueillis à la croisée des chemins. Un mot d’ordre  qui vaut pour la paroisse, comme pour le Centre 72, l’Entraide et la Maison des Jeunes. Un accueil à vivre de manière permanente pour faire place à l’autre , saluer, écouter, rencontrer, agir ensemble. Et cela pour rien !! par pure joie de le faire et de le vivre sans chercher quelconque mérite, récompense ou gloriole . Car n’oublions que Paul termine son exhortation à l’accueil par ce final et cela « pour la gloire de Dieu » !

Oui, faire du Centre 72 , dans ses dimensions spirituelles, culturelles, et diaconales, un vrai lieu d’accueil pour tous , un lieu de lien social au nom de Celui qui est l’Accueillant par excellence.

Un accueil qui n’est pas réservé à la première rencontre mais un accueil à sans cesse renouveler au travers de toutes les rencontres que procure une vie de communauté.

A chacun de nous ensuite, à sa manière de traduire cet accueil par des paroles adéquates, un sourire, un geste, une attention où que sais je encore.

Accueillant les uns des autres, les uns par les autres car fondamentalement tous accueillis par Celui qui donne vie.

Amen

Pasteur Denis Heller