Généalogie de Jésus (prédication du 16 septembre 2012)

Dimanche 16 septembre 2012

 

Texte biblique : Matthieu 1, 1,1-17

Qui est Jésus ?

Si Luc ne se presse pas pour répondre, les trois autres évangélistes proposent une réponse dès leur premier verset.

Pour Marc, Jésus est le Messie et le Fils de Dieu. Pour Jean, il est la Parole de Dieu.

Matthieu, lui, nous dit qu’il est le Messie, fils de David, fils d’Abraham.

Au lieu de nous projeter dans l’avenir, il nous plonge dans le passé, en détaillant la généalogie de Jésus, sur 42 générations, ou plutôt, une généalogie possible parmi beaucoup. Vous le savez, j’aime les maths et peux donc vous annoncer qu’avec 42 générations, il y a théoriquement 4400 milliards de personnes au dessus de nous.

Matthieu ne fait donc pas office de généalogiste.

En dressant une liste des ascendants de Jésus, il nous dit qui est Jésus pour lui, ce qu’il représente, annonce, rend possible.

Vous l’avez sûrement remarqué, Matthieu divise sa liste en trois périodes de quatorze générations chacune : d’Abraham à David, de David à la déportation à Babylone, et de la déportation jusqu’à Jésus.

Chacune de ces périodes est semblable à une lumière qui éclaire une facette de Jésus.

Matthieu choisit de débuter la première période avec Abraham.

Il présente ainsi Jésus comme l’héritier de l’alliance conclue entre l’Eternel et Abraham.

Bien loin d’être caduque, cette alliance entre Dieu et son peuple est ainsi confirmée par sa naissance.

Elle est même approfondie. Car, avec Jésus, Dieu développe ses liens avec ses enfants.

Les promesses que Dieu a faites à Abraham, promesses de liberté et de bénédiction, sont accomplies avec Jésus.

La deuxième période débute avec David.

David est un grand roi. Il est surtout le prototype du Messie.

Celui qui viendra, celui qui établira le règne de Dieu sur Terre, ressemblera à David.

Comme lui, il régnera.

Comme lui, il pratiquera la justice.

Comme lui, il chantera la gloire de Dieu.

Simplement, il sera plus grand que David.

Il sera le Messie.

Ce qui était attendu se réalise, avec Jésus, en Jésus, par Jésus.

Le Messie est au milieu de nous.

La troisième période de la généalogie s’ouvre avec l’exil à Babylone.

L’Exil est, bien sûr, l’une des périodes les plus sombres de l’histoire d’Israël.

Il cristallise l’infidélité du peuple, et son sentiment d’être abandonné par son Dieu.

Mais l’Exil dit aussi que Dieu est présent, même en captivité, même loin du Temple.

Jésus est héritier de l’Exil.

Sa vie sera aussi marquée par l’échec apparent, par l’infidélité des disciples.

Enfin, au moment de sa mort, Jésus se sentira abandonné de Dieu.

En même temps, Jésus témoignera par son enseignement, sa vie, sa mort, que Dieu est présent dans notre vie, même lorsque cette vie est en exil et l’échec dominant.

Résumons-nous :

  • Jésus est héritier d’Abraham et donc de l’alliance

  • Jésus est héritier de David ; il est le Messie tant attendu.

  • Jésus est héritier de l’exil.

Jésus récapitule l’histoire du peuple juif.

La généalogie de Matthieu se termine par la mention suivante : « Jacob engendra Joseph, l’époux de Marie, de laquelle est né Jésus ».

Matthieu prend le soin de mentionner le nom des parents et du grand-père paternel de Jésus. Il nous dit ainsi l’humanité de Jésus.

Jésus n’est pas un dieu ou un extraterrestre qui aurait pris l’apparence d’un humain, comme on en voit dans tellement de mythes ou de films de science-fiction.

Il est pleinement humain.

Jésus a des parents qui l’aimeront et le protégeront leur enfant, se feront du souci pour lui, vivront douloureusement son autonomie progressive.

Jésus s’inscrira non seulement dans une famille mais aussi dans un peuple avec ses traditions, sa culture.

Ainsi, Jésus est pleinement humain ; et il en témoignera au fil de sa vie, en aimant, en pleurant, en ayant faim ou en se mettant en colère.

Il est humain mais il est également parole de Dieu, présence de Dieu.

C’est pourquoi Matthieu signale dans sa généalogie qu’un événement exceptionnel a eu lieu au moment de sa conception.

Matthieu évoque « Marie, de laquelle est né Jésus ».

Par cette mention discrète, Matthieu souligne que Dieu est intervenu.

De sa conception à sa résurrection, la vie de Jésus est travaillée par l’action de Dieu.

Avancer sur les traces de Jésus, c’est aussi cela : se laisser travailler, besogner comme le disait Calvin, par Dieu, le laisser faire de nous une créature nouvelle.

Vous le voyez : la naissance miraculeuse de Jésus n’a pas pour objet de glorifier Marie, encore moins de discréditer la sexualité. Elle n’invite même pas à croire en Jésus à cause de ce miracle.

Elle célèbre l’action souveraine de Dieu dans la vie de Jésus, de sa naissance à sa résurrection ; elle nous invite à laisser Dieu agir souverainement dans notre existence.

Nous pourrions nous arrêter là et voir en Jésus celui qui récapitule l’histoire du peuple juif et manifeste la présence de Dieu dans notre vie.

Mais Matthieu veut nous transmettre, dès le début de l’Evangile, une autre bonne nouvelle : Jésus ouvre une période radicalement nouvelle.

Avec Jésus, une nouvelle ère commence.

Matthieu a découpé la généalogie de Jésus en trois sections de quatorze générations.

Un autre découpage est possible : en six sections de sept générations. Jésus étant le 43ème nom cité, il inaugure la 7ème période de sept générations.

Or, comme vous le savez, dans beaucoup de religions, le chiffre « 7 » annonce la plénitude. Ce n’est pas hasard si la création du monde et le repos de Dieu se déclinent en sept jours.

Avec Jésus s’ouvrent des temps nouveaux.

L’ensemble de sa vie, avec ses béatitudes, ses paraboles, ses guérisons, ses controverses, sa mort et sa résurrection attestent de ce monde nouveau, de ces temps nouveaux.

En Jésus, par Jésus, Dieu intervient directement dans les cœurs, agit au plus secret des êtres, ouvre les intelligences, donne la paix et le pardon, guérit, relève, abat les murs de séparations que les hommes dressent entre eux.

La porte du Royaume est ouverte et plus rien ni personne ne pourra la refermer.

Ainsi, avec cette généalogie, nous prenons conscience que des temps nouveaux s’ouvrent et qu’il est temps d’adapter notre vie à cette ère nouvelle.

Oui, il est temps de mettre nos pas dans ceux du Christ.

Il est temps de vivre un peu de la paix, du pardon et de la confiance que le Christ porte en lui et nous communique.

Il est temps d’adapter notre vie conjugale, familiale, professionnelle à ce monde nouveau.

Il est temps de mettre au centre de nos vies le don plutôt que l’avidité, l’échange plutôt que la compétition.

Il est temps de prendre l’Evangile au sérieux.

Amen !